I O I I Bulletm de la SOCIEÉE [ O Herpet0l0g1que de France 1€1' trimestre 2000 N° 93 T- ‘ U .. I,-1l ` I §? î' *1*}.+ 2 " 9 .. · Z __ 0 9 W " I l - > J-·` rvg ‘j ` `• I A · _fr rër '* É T gi V. I l.`,` V I r, ,,\ 7 I r l . TF-- _ . 0 T;;t;··%·1:`ï~9î`ï· V ; le '. H — 0 xi N > _·« sg, ïg;`. - . il.; ’ . a»£._·· A_ pra -, · qa?. à 9; __!· I- if? A l.; ··r· V i•" '.!` T . · · ` ·,1_· " -" - A ·" ` · ' .' ' V" È—'·"h · ' » ‘ r .. - · V . - ~ . ,Ã_,· __, .4;-.-%+ W " —-·*···‘·2·»·—--» , -59;;% '- ` ,i- ''’’ ` ""r ` .-· ,.:1 É'} ,9 A- *0 .Q .$»·' _,,_ I U- .5 #3gÉ ' -5;. ·.·~- ' _ . . <ï-·<'îr- zywf x 0 .` ·¤’ .-·_ -. ·=0` ï L `- - e'»ê;?x*=0-‘ yj ,_ C A‘0‘î e .,%T'Ér`;;ü‘*«[%$É*@ I-; Q·s<?'«~i * ""' ` 0 W e` . ·`>-e 6 i L -9 I, ·4‘'_' 9 . .- ÉTÉ ?¤'··· .;.;i.;` ' * ·° ,,‘ · J'. i·L:· ,—« .«' . ‘» · - - [55N 0754-9962 Bull. Soc. Herp. Fr. (2000) 93
BULLETIN DE LA SOCIETE HERPETOLOGIQUE DE FRANCE 1er trimestre 2000 N° 93 SOMMAIRE • Le nid chez la Tortue Luth, Dermochelys coriacea (Vandelli, 1761). Ill - Aberrations dans le creusement Alexis BILLES (gz Iacques FRETEY ...................................,........ 3-19 • Etude et protection de l'herpétofaune d'une grande ville : Pexemple de Bruxelles Christiane PERCSY .............,.............................,.......,..........,.., 21-26 • Captures accidentelles de tortues marines par la flotille crevettière de Guyane française Frédéric GUEGUEN ,....,....,..................................,..,.,............, 27-36 • Observations préliminaires sur Pherpétofaune de la République de Djibouti Roland VERNET ...,...............,.....................,......,..................... 37-43 • In memoriam : Albert Henri RAYNAUD ..................,,.,............ 45-47 • Symposium sur la réintroduction des Chéloniens ..........,............ 48 1
BULLETIN DE LA SOCIETE HERPETOLOGIQUE DE FRANCE 1Sî trimester 2000 N° 93 CONTENTS • The nest of the luth or Leatherback turtle, Dcrmochclys coriacea (Vandelli, 1976). III. Digging disorders. Algxjg BHÃLES gr Jacques FRETEY ..............,............................, 3-19 • Study and protection of herpetofauna in a large city : case of Brussels Christiane PERCSY ........................................i....,.......,........,... 21-26 • Accidental captures of sea turtles during commercial shrimp trawling in French Guiana Frédéric GUEGUEN ..,...........................................................·.., 27-36 • Preliminary study of herpetofauna in Djibouti Roland VERNET ,.........................................................,........,.., ` 37-43 • In memoriam : Albert Henri RAYNAUD .................................. 45-47 • Symposium on Chelonian relocation .......,....,.....,................,..... 48 2
Ball. Soc. Herp. Fr. (2000 ) 93 : 3—19 Le nid chez la Tortue luth, Dermochelys coriacea (Vandelli, 1761). III. Aberrations dans le creusement par Alexis BTLLES (ll et jacques FRETEY (2) ll) Cellule de Coordination ECOFAC, BP 15115 Libreville (Gabon) E—inail: pr0to7rzac_lbv@yahoo.ie (2) Fédération française des Sociétés de Sciences naturelles, Muséum national a"Histoire naturelle, 57 rue Cuvier 75231 Paris cedex 05 (France) E—niail : yfreteyiâèiniatechfr Résumé — La forrnc du nid chez la Tortue luth, Dermoclielys coriacer: (Vandelli, 1761) semble conditionnée par l'état des membres postérieurs, Les auteurs décrivent ici les modifications qu'il su it avec divers patrons de mutilations. Ils citent le comportement des femelles lors du creusement du nid trop près des vîîues, ainsi que diverses a errations du processus de creusement, avec ou sans pattes mu ` Différents cas de construction de doubles nids sont signalés pour la première fois. L'influence des traumas sur les mouvements, la durée du creusement et a ponte est étudiée. Ces aberrations peuvent avoir des conséquences importantes pour la reproduction de l'espèce, donc sur sa conservation. M0ts·c1és: Dermoclielys coriacea. Reproduction. Nid. Blessures. Conservation. Guyane française. Summary — The nest of the Luth or Leatherback turtle, Dermochelys corirzcea (Vandelli, 1761). III - DigFing's disorders. Hind Iimb integrity or otherwise in Leatherback turtle, Derrnoclie ys coriacea (Vandelli, 1761) has an influence on nest shqpe. 'The authors describe nest shape resulting from different kinds of lixnb iniuries. he behaviour of females nesbdigging too close to waves, and instances of dâçing disorders with ou without damaged feet and double·nest digging are reported on. e influence of traumas on movements, digging duration and laying are descri ed. These aberrations can have serious consequences on reproduction in the species, and therefore conservation too. Key-words: Derrnochelys coriacea. Breeding. Nest. lnjuries. Conservation. French Guiana, I. INTRODUCTION La littérature concernant la forme du nid chez les tortues marines est très pauvre. Pour la plupart des auteurs, elle correspond à une simple cavité creusée de façon grossière par des pattes postérieures malhabiles. Chez la Tortue luth, Dermochelys coriacea (Vandelli, 1761), d’après le schéma de Fretey (1975, 1981) repris par Bruno (1978), on pouvait supposer que le nid ressemblait à une botte. Les études menées pendant les saisons de ponte 1995 et 1996 sur le site de nidification de Yalirnapo (Guyane française), réalisées à l’aide de moulages en mousse de polyuréthane, ont démontré que la forme générale (en négatif) évoquait plutôt celle cl'une patte d’éléphant. 3
Trois parties peuvent être différenciées dans un nid normal, de la surface vers le fond : une cuvette tectale, u.n puits de ponte et une chambre d’incubation (Fig. 1). La cuvette occupe un peu plus de 40% de la hauteur totale du nid, le puits de ponte, subcylindrique, représente environ 15% et la chambre dïncubation occupe presque 45%. 1 C A 4 1 5 cuvstto > 6 puits > 7 D chambre d’Incubat|¤n > B Figure 1 : Nid normal dIU.1'1€ Luth femelle aux pattes postérieures intactes. A. Vue latérale (1 : axe virtuel); B. Vue antérieure et différentes Cparties; C. Coupe transversale au niveau du puits (2: largeur antéro-postérieure); D. oupe transversale au niveau de la chambre cl'incubation (3: largeur antéroposterieure; 4: largeur latéro- latérale ; 5 : diamètre oblique gauche ; 6 : diametre oblique droit). Selon les mesures que nous avons effectuées sur la plage cle Yalimapo, la profondeur moyenne d'un nid de Tortue luth est de 70 cm. La plus grande largeur du puits de ponte est en moyenne de 34 cm et le volume moyen est cle 6 litres. En ce qui concerne les dimensions de la plus grande section de la chambre d'incubation, la moyenne de la largeur antéro-postérieure est de 30,7 cm et celle de la largeur latéro—latérale cle 32,3 cm. Le volume moyen de la chambre d'incubation est de 15 litres. Le temps moyen habituel de toute l'opération de creusement du nid est de 25 minutes et 46 secondes (écart type = 360,11 ; étendue: 1059—2671" ; n = 43). Le 4
processus de creusement du nid est plus compliqué qu'il n’y paraît lors d’une observation superficielle. ll a été décrit par Billes et Fretey (sous presse - b). Après la ponte, le nid devient un milieu clos, complexe, aux paramètres physiques bien définis (profondeur, température, humidité, gaz, composition et granulométrie du sable des parois). La température intervient sur le déterminisme du sexe cle l'em‘oryon pendant une période thermosensible (Rimblot et al., 1985) et toute aberration morphologique du nid va entraîner une perturbation de la température d'incubation. Ce micro—écosystème peut aussi être déstabilisé em température et humidité par une autre Luth femelle qui malencontreusement va creuser son nid en superposition d’un nid préexistant. Fretey (1981) a répertorié de nombreuses blessures chez des Tortues luths femelles en Guyane française. Sur 6791 individus examinés, 411 cas de blessures importantes aux membres ont été dénombrés dont 209 pour les palettes postérieures. Ces mutilations sont très probablement dues à des prédateurs marins, Requins tigres ou Orques. L’auteur présentait des schémas de nids aberrants creusés par des femelles handicapées et précisait que l’une des femelles observées, malgré un moignon remplaçant la palette gauche avait réussi à creuser un nid acceptable et à le reboucher sans dommage pour les œufs. Hughes et al. (1967) ont signalé au Sodwana (Afrique du Sud) des cas de gêne pour le creusement liés à une mutilation des membres postérieurs. En 1993, Fretey a fait un véritable inventaire codé des blessures permettant de doubler Videntification par marquage traditionnel ou transpondeur magnétique (PIT) et de réaliser une véritable carte d’identité des tortues blessées. Dans ce travail 45 types de traumas sont recensés aux membres antérieurs et 31 aux membres postérieurs. Il nous a semblé intéressant de poursuivre plus en détail l'étude commencée par Fretey dès 1975 sur des nids réalisés par des Luths femelles présentant des traumas, et de s'attacher davantage au mécanisme du creusement. II. MATERIEL ET METHODE Ijétude a été réalisée pendant les saisons de ponte 1994, 1995 et 1996, essentiellement sur la plage de Yalimapo — Les Hattes (Guyane française), dans le cadre des campagnes Kawana financées par le Ministère de l’Environnement (Direction de la Nature et des Paysages, Plan de Maintien de la Biodiversité) et le WWF—France. Afin de pouvoir obtenir wie reproduction fidèle du nid d’un certain nombre de Tortues luths, nous avons réalisé 14 moulages en mousse de polyuréthane (diphényl—méthane—4,4'-diisocyanate) selon une méthode originale (Billes & Fretey, sous presse—a). Parmi les nids moulés, 3 construits par des femelles aux pattes mutilées se sont révélés aberrants. Le processus de creusement d’un nid aberrant a été partiellement ou complètement suivi chez 40 femelles aux pattes postérieures mutilées. Différents patrons de mutilation ont été relevés 1 forme des pattes dessinée sur une fiche et photographies des membres postérieurs. Nous avons réalisé in chronométrage du creusement et dénombré les actes de raclage en utilisant la 5
méthode que nous avions déjà appliquée chez des tortues dont les pattes étaient normales. L’influence des mutilations sur le mouvement et la durée de creusement du nid a été observée. L'idée des expérimentations entreprises était de tenter d’évaluer la sensibilité des pattes postérieures à diverses perturbations naturelles (arrivée d’eau, obstacles, comblement par du sable jeté par une autre femelles,). Pour tester si le déroulement du creusement était immuable, quel que soit l'état des membres postérieurs, nous avons réalisé 3 types d'expérience. Dans la première, nous avons bouché le nid toutes les 5 minutes pendant plus de 25 minutes. Pour la seconde, nous rebouchions le puits après 20 minutes de creusement, soit quelques minutes avant l’arrêt théorique du creusement du nid. Dans la troisieme, nous intercalions un obstacle (planchette) empêchant le creusement une dizaine de minutes apres le début de celui—ci, alors que le nid avait déjà atteint une bonne profondeur. III. RESULTATS A. Patrons de mutilation Les différents traumas observés sur le site de Yalimapo pendant les saisons 1995 et 1996 nous ont permis de définir chez les Luths femelles adultes 3 groupes de mutilations des pattes postérieures 1 l. Mutilations ne touchant que la palmure d'un ou des deux membres postérieurs ll s’agit de traumas localisés à la palmure des membres ou touchant éventuellement les seules phalanges distales. ll s'agit généralement de petites encoches situées sur le bord médial des pattes postérieures; la où la palmure est la plus souple, donc plus sujette a déchirure. Mais, il peut s’agir aussi d'encoches plus profondes au niveau de la palmure unissant les orteils lll et IV ou les orteils IV et V. 2. l\/lutilations touchant les phalanges moyennes ou proximales d'un ou des membres postérieurs Ces mutilations sont beaucoup plus handicapantes puisqu'elles touchent les orteils au niveau des phalanges moyennes ou proximales et les réduisent aux seuls métatarsiens. Ces traumas sont plus ou moins importants compte tenu du nombre d'orteils touchés à un ou deux membres. 3. Pattes postérieures réduites à un ou deux moignons Dans ces mutilations, les pattes postérieures sont coupées au niveau du métatarse ou du tarse et parfois même au niveau de l’extrémit distale du tibia et de la fibula. La patte est réduite à un simple moignon. B. Nids aberrants 1. Aberrations de creusement Nous avons été témoins de creusements aberrants chez des femelles présentant des membres postérieurs normaux ; c'est pourquoi nous commencerons par décrire ici des aberrations de creusement sans mutilation des pattes ni perturbations apparentes, puis cl'autres aberrations directement associées à 6
diverses perturbations. Enfin, nous présenterons les résultats des expériences réalisées par perturbations artificielles du creusement. a. Sans mutilations apparentes Nous avons pu observer dans quatre cas des interruptions de creusement chez des femelles aux pattes postérieures normales zcelles-ci commencent a construire leur nid puis abandonnent leur ouvrage après un temps variable. Dans chaque cas, la tortue était installée sur une zone de plage déserte, non perturbée par une présence humaine autre que celle, discrète de l'observateur. La Luth est d'ailleurs relativement insensible à une présence humaine proche d'elle (Fretey 8: Gaulejac, à paraitre). Dans le premier cas, la femelle a arrêté son creusement au bout de Sminutes, a procédé au balayage de I'aire de nidification puis a regagné l'océan. Dans le second cas, la femelle a interrompu son creusement au bout d'une quarantaine de minutes, a comblé son nid sans pondre, a balayé, puis est repartie. Nous n’avons rien remarqué d'anormal durant le creusement, mais l a chambre d'incubation était très nettement déviée vers la droite comme si le travail de la patte gauche était plus efficace que celui de la patte droite. Quant au troisième cas, il s'agissait d’une femelle qui a arrêté son creusement au bout de 39 minutes et est immédiatement repartie vers l'océan. lci encore le creusement se déroulait normalement. Ence qui conceme le Zèmf et le 3È’m€ cas, la durée du creusement enregistrée est supérieure à la moyenne et il est difficile de dire s'il s’agit véritablement d'une interruption de creusement ou si ce dernier est effectivement arrivé à son terme. Dans le 3ème cas cas, la tortue a interrompu son travail au bout d’une dizaine de minutes et a regagné la mer; mais, cette fois, le creusement n'était pas normal. En effet, la femelle présentait des mouvements de creusement inefficaces suite à une incapacité à crisper sa patte postérieure en gouttière et donc à remonter le sable. Un examen détaillé des deux membres postérieurs, effectué avant que l'animal ne reparte, ne nous a pas permis de mettre en évidence une quelconque malformation ou blessure. Nous avons pu également observer des processus de nidification menés jusqu’à leurs termes au cours desquels le déroulement du creusement était d’une durée anormale. Par exemple, lors d'un creusement d'une durée d’environ 38 minutes, nous avons noté que les premiers mouvements de raclage étaient totalement inefficaces. Au bout de7 à 8 minutes, le creusement est devenu efficace et la construction du nid s'est alors déroulée normalement. Sur unautre individu, nous avons observé des mouvements de creusement inefficaces du membre postérieur gauche alors que la patte droite creusait normalement. Les cadences de raclages étaient toutefois particulièrement élevées (en majorité supérieures a 6 raclages par mouvement de creusement et atteignant même jusqu'à 12 raclages). Le creusement du nid s’est terminé au bout de 35 minutes. Un autre type de dérèglement des mouvements de creusement a été observé ; pendant les premières minutes, la femelle ne remontait pas ses pattes pour évacuer le sable. La patte gauche effectuait un raclage, restait dans le trou 7
avec le sable au creux de sa palmure, puis la patte droite descendait, réalisait 1 ou 2 raclages, demeurait elle aussi dans le trou en gardant le sable gratté, et alors la patte gauche déversait son sable hors du nid pour ensuite redescendre, effectuer d'autres raclages avant que la patte droite ne rejette le sable à son tour et ainsi de suite. Le creusement est ensuite redevenu progressivement normal pour se terminer après 18 minutes. Nous avons observé deux femelles creuser deux nids distincts, l’un avec la patte gauche, et l'autre, parallèle au premier, avec la patte droite. Chaque trou a atteint une profondeur d'environ 50 cm. Ensuite, les tortues se sont mises à réaliser un autre trou au centre des deux premiers et les trois cavités ont fini par n'en former plus qu’une seule. Dans le premier cas, la femelle s'est interrompue au bout de 29 minutes et est partie sans pondre, mais, dans le second cas, la tortue a terminé son creusement après 33 minutes et a pondu tout à fait normalement. Mais le cas le plus spectaculaire de creusement d'un double nid a été observé en 1995. Les deux nids étaient parfaitement symétriques, de forme conique, d'1me profondeur de5Ucm chacun avec un écartement entre les pointes basales de 65 cm. Un petit monticule séparait les 2 cavités. Les oeufs commencèrent à tomber dans la cavité de gauche, puis lorsque celle—ci fut pleine, les œufs s’accumulèrer1t sur le monticule et tombèrent dans la cavité de droite (Fig. 2). . p C- (n · _ ) \. rm Sow . 65 cm . --—-·—··î·îl Figure 2. : Cas très rare de double nid avec remplissage des 2 cavités par les œufs (Yalimapo, 29 juin 1995). 8
b. Perturbations naturelles Les facteurs influant sur la sélection de l’emplacement de creusement du nid par une Luth femelle restent inexpliqués (Fretey & Billes, à paraître). ll nous est arrivé à plusieurs reprises d'être témoins d’un creusement de nid perturbé par des inondations. La tortue, installée au ras de la mer est, dès le début de son travail gênée par des vagues qui viennent submerger sa patte gauche et envahir le nid en formation; elle arrête alors généralement son activité au bout de 6 à 7 minutes puis effectue un balayage normal avant de repartir vers l’océan sans pondre. D'autres fois, la femelle, installée à 1 ou 2 mètres de la mer, commence tout à fait normalement son creusement. Après un quart d’heure, de l’eau apparaît au fond de la chambre d'incubation et les parois du nid s'effondrent ure première fois. La tortue continue alors à creuser pendant une quarantaine de minutes, faisant face à toute une série cïeffondrements pour réaliser son nid, alors de forme et de profondeur aberrantes. Les oeufs sont pendus dans ce nid inondé. Le comblement est généralement effectué selon le protocole normal, les pattes manipulant du sable imbibé d'eau, fluide et peu apte à boucher la cavité du nid. Le creusement du nid peut être perturbé par des obstacles rencontrés; il s’agit souvent de racines. ll arrive aussi que la femelle creuse son nid sur m autre nid et déterre ainsi toute une partie de la ponte d'une autre tortue. Généralement, le creusement du nid est mené jusqu’à son terme mais la femelle ralentit ses mouvements de creusement et marque de nombreux temps d'arrêt. Une Tortue luth abandonne difficilement son ouvrage a moins qu'elle ne rencontre un obstacle l’empêchant véritablement de creuser. c. Perturbations expérimentales Lors d’une dizaine d’expérimentations, l’intercalation d'une planchette dans le nid, après 10 minutes de creusement, a conduit chaque fois la femelle à quitter celui-ci après avoir tenté de poursuivre son ouvrage pendant plus de 4 minutes. Lorsque nous avons rebouché complètement un nid après 20 minutes de creusement (soit environ 5 minutes avant l’arrêt du processus), nous avons emprisonné dans le puits la patte droite de la femelle;cette dernière n’a manifesté aucune réaction pendant 1 minute, puis a recommencé normalement tout le protocole de creusement. La troisième opération, consistant a reboucher le nid toutes les 5 minutes avec du sable et à tasser celui—ci, débutait après environ 6 minutes de creusement alors que le nid avait déjà atteint une profondeur de 70 cm. Ces expériences nous ont permis de constater plusieurs faits : — la femelle n’interrompt pas son travail ; — le nombre de raclages par mouvement de creusement diminue généralement lorsque la patte recommence le creusement ; - la durée du creusement peut être largement augmentée. Nous l'avons prolongée jusqu'à 54 minutes, après quoi nous avons volontairement arrêté cette expérience. Une seule femelle est partie sans pondre après 38 minutes ; 9
— le nombre de raclages en fin de creusement augmente rapidement jusqu':} parfois 10 raclages, pouvant même atteindre 14 raclages par mouvement de creusement ; — après une quarantaine de minutes, les mouvements s'espacent de façon significative. d. Mutilations conséquentes Nous distinguerons ici deux types d'influences des mutilations des pattes postérieures sur le creusement : répercussion sur la réalisation du mouvement de creusement, ou bien répercussion sur le patron global du creusement en modifiant par exemple la cadence des raclages ou encore la durée du creusement. Influences sur le mouvement de creusement, Les mutilations ne touchant que la palmure d'un ou des deux membres postérieurs semblent rarement gêner la réalisation du mouvement de creusement, en particulier lorsqu'il s’agit simplement de petites entailles au bord interne des membres postérieurs. Par contre, les encoches de la palmure des orteils Il] et IV perturbent beaucoup plus le mouvement de creusement. Nous avons observé deux individus présentant chacun une telle entaille sur l’une des palettes postérieures ; le raclage s’effectue normalement mais le sable gratté s'écoule alors par la palmure. Seul le membre non mutilé a la capacité d'évacuer le sable, Les mutilations touchant les phalanges moyennes ou proximales d'un membre postérieur ou des deux peuvent gêner le raclage ou la remontée du sable selon les orteils touchés. Lorsque l'orteil IV est coupé au niveau de sa phalange proximale, l'orteil V étant ou non coupé au niveau de la phalange moyenne, la patte postérieure est incapable de collecter et de remonter le sable raclé (fig. 3, A). Une mutilation touchant les phalanges moyennes des orteils Il et Ill (fig. 3, B) et parfois de l'orteil IV, même s’il ne s’agit que de leurs extrémités distales, peut s'avérer aussi très handicapante ; la femelle ne parvient pas à crisper le membre touché et donc à le transformer en "cuillère" pour évacuer le sable. Les mutilations touchant les phalanges moyennes et/ ou proximales du (11 des premiers orteils I, Il et III (fig. 3, D) se révèlent une gêne importante pour le raclage du sable des parois du nid ; la palmature rigide a alors complètement disparu ou est trop fortement tronquée pour pouvoir entamer le sable des parois du nid en construction. Bien sûr, lorsque la mutilation s’étend à toutes les phalanges d'une palette postérieure (fig. 3, E) ou des deux palettes le mouvement de creusement est rendu totalement inefficace. Si les deux pattes sont atteintes par de tels traumas, le nid se réduit à une simple cuvette. Lorsque les pattes postérieures sont réduites à un ou deux moignons (fi g.3,F), le mouvement de creusement est rendu complètement inefficace. Le moignon gratte la surface du sable sans pouvoir élaborer de véritable cavité. Lorsque l'un des membres postérieurs est intact, il effectue généralement un mouvement 10
A , B , C · ":·È_ i I IE 3. r·‘. 2, i> *¥_'J `Q: __, ·\.·• .. 1 n_·-l ` L ··. .T» C " I Y].- È " -`·. '•, · .! î_ ·· "r n Il ;— `*·_ É} II S \·` É Z Z É I, ,1 L. _.':A il - ' i . ·. " — .. ` '=` ',·‘« î -3 si" 2 ti `îïi il ‘ ; »· . " `1 · 2 $ · *2 L i ¤ E F et _ il Ii-` ji, ft; l` 4 I·_ I` ét ‘ .. "` * Q ib I` î" LQ-` ii. Figure 3 : Différents cas de traumas aux pattes postérieures. I,e squelette est représenté schématiquement en grisé. A.Profoncle encoche dans la palmure foignant I’orteil HI à l'orteil IV; B. Mutilation des phalanges cles orteils Il et III ;C, Muti ation de la phalange proximale de l'orteil IV et de a phalarige moyenne de I’orteil V ; D. Amputation des rnétatarsiens des orteils I et Il; E. Amputation de tous les orteils au niveau des extrémités proxirnales des orteils l à IV et de la p alange moyenne de l'orteil V ; Ii. patte gauche réduite à un moignon après amputation au niveau du tarse. de creusement efficace. Cependant le comportement de la femelle peut être dérange et le membre normal est alors animé de mouvements désordonnés. Tout creusement est alors impossible. Le moignon du membre opposé peut gêner son travail en provoquant notamment I’écroulement de sable dans le nid en cours de construction. Le moignon, lorsqu’il est tres court, effectue un mouvement ("à vide" ?) analogue à celui que le tibia effectue habituellement lors du creusement. Influences sur les raclages et la durée du creusement. Un chronométrage détaillé de l’activité de creusement effectué sur 19 femelles a permis, à partir des moyennes de nos résultats, de proposer un protocole de creusement pour l’ensemble des tortues aux pattes postérieures mutilées, Au début du creusement, chaque patte postérieure fait cl’abord l seul mouvement de raclage. Puis, après un temps moyen de 3 minutes et 36 secondes (écart type:124.65 s, étendue $789-517.63 s, n=16) la patte passe à 2 raclages par mouvement. Ensuite, à un temps moyen d`environ 7 minutes (écart-type 432.55 s, étendue 33.98-1846 s, n:18), le nombre de raclages s`éIève à 3 puis à 4 11
au bout d’un temps moyen de 14 minutes et 32 secondes (écart type: 566.42 s, étendue 128.92-2124.53 s, n:19). Parfois le nombre de raclages par mouvement de creusement reste à ce stade, mais le plus souvent la cadence s'élève à 5 raclages après 29 minutes et 49 secondes (écart type : 959.83 s, étendue 269.88- 3981.73 s, n:16), puis 6 raclages après un temps moyen de 31 minutes et 51 secondes (écart type: 1051.52 s, étendue 703.53—43l1.33 s, n:10). Les triples et quadruples raclages sont les plus fréquents chez les tortues aux pattes mutilées comme chez celles aux pattes normales avec 33,6% et 28,2% des raclages totaux, puis sont également nombreux les simples raclages et les doubles raclages avec 12,8% et 17,3%. Parmi les 19 individus mutilés dont le creusement a pu être suivi dans sa totalité, 10,5% n’ont pas effectué de simple raclage. Les doubles, triples et quadruples raclages sont quant à eux toujours représentés et la cadence à 5 raclages est absente chez 15,8% des sujets. Les cadences supérieures sont beaucoup plus rares puisque la cadence à 6 raclages n'est présente que chez 57,9% des individus et celles supérieures à ce nombre sont absentes chez plus de 42% des femelles étudiées. En ce qui concerne la répartition des cadences, la différence est significative par rapport à la répartition observée chez les tortues ne présentant pas de mutilations (?»2=36, p<0.001). De même que chez les Luths à pattes normales, l’arrêt du creusement se termine par une cadence généralement assez élevée puisqu’elle est supérieure à 5 raclages dans 57,7% des cas. La cadence peut encore augmenter, mais elle dépasse très rarement 7 raclages. Dans un cas, la tortue a effectué 10 raclages au cours du dernier mouvement de creusement. La figure 4 présente le schéma d’un tel protocole de creusement où la cadence n’excèderait pas 6 raclages. La figure 5 présente Vimportance quantitative des différentes cadences les unes par rapport aux autres : comme pour les tortues aux pattes postérieures normales, les triples et quadruples raclages sont les plus fréquents et représentent respectivement 33,6% et 28,2% des raclages totaux. Ensuite, viennent les simples raclages et les doubles raclages (12,8% et 17,3%) puis les cadences à 5 raclages (5,5%) et enfin à 6 raclages ou plus (2,6%). La répartition observée est donc tres proche de celle obtenue à partir des observations réalisées sur les individus aux pattes normales. Par contre, si l’on considere seulement le groupe des femelles présentant un ou deux moignons, les fréquences des triples et quadruples raclages (respectivement 55,2% et 35,2%) sont nettement augmentées aux dépens des fréquences des simples et doubles raclages (3,4% et 3,7%). La différence par rapport aux valeurs observées chez des tortues aux pattes postérieures entières est d’ailleurs tres significative @2:224, p<0.001). Pour l’ensemb]e des tortues mutilées, le temps moyen de toute l'opération de creusement du nid est de 39 minutes et 39 secondes (écart type: 1507.3 s, étendue 998-7212 s, n:19). Nous avons observé une tortue avec deux pattes postérieures fortement mutilées creuser pendant 2 heures 32 minutes et 18 secondes, le chronométrage ayant commencé lorsque le nid était bien entamé. 12
î î î î t ? s E s 5 5 E -ë E 1 ¤ 1* 2 È a E- É 2 —-~ ···—·· · 4, L1;~2e2se<i¤sÉ ~ E Z 1 D NN^••»•O•|•|O ü •••II|••••|•|•4•+¢\l~•1¢§ë•\l|l•¤i••••|•*~¤»N•¤Wh*®¥¤M-¤•MH«M%WI|MPWJ^MM4N%lM%W$»H»M•l·w-¤W¤`;5N•|;¤I:HM Q2Z”i'~î¥*·§‘¤9°î°?‘gëî"‘îî§.—*"¤ëî·‘§§§*’*“îï2¤5 N rl un r·— •· *`— "· "‘ "‘ ëêîëî zscseâîâ §s§¤::e:s§;;·g;e>È;;§g~ Temp: en secnmlti Fiâure 4 : Evolution du nombre de raclages au cours du creusement du nid pour un éc antillon de Luths femelles présentant de graves mutilations aux pattes postérieures. Deux points consécutifs représentent 2 mouvements de creusement réalisés pour le premier par une patte et pour le second par l'autre patte. Chez les femelles présentant des pattes entières, le assa e à 2 racla es a lieu en mo enne vers 217 secondes, à 3 vers 409 t S r secondes, a vers 706 secondes et a 5 vers 1207 secondes. 35 —'i ., “"—·‘·”*o*‘ ‘s‘‘' “"t 2 F i î Lt" ` " ` au 39 É I E 7È`>·e·m*«l¥Ã ‘ É" " 1 i ¤ 25 =€·`t¤¥‘e=f · a‘!f3·5't '¤‘. y E iI·;îÈk(¤_§f'$ .·,"-»··?.·‘·, -,;1 .x="_ . 8 29 r+‘atï:xr #·n«¥¤.’tîi È É ,.,.,,.,È,,..., t,~#et;_<;;;sî ; [1% du total des ractages *·‘,; = 1,; ,·.~ ¤_t;‘_‘.”< } tc “ —-- Éz 15 ,.,.1 ._mE`· ·. ·'E:>:r.-z; www É ·.·· t* "¤. g =_· .· ,g·__ « nü 2 10 ;;=;EyJt·,<€f>.Éî ‘st=dÃ2»ùeb·c, E - ¤ <· :..···¤¤»l·ii·»L .rt+‘È5·`i·;··«" ,=. , ' l 1:: 5 *€·¤*-···¤ï*.:"." t'Lî.,gÉ;:T.ï«:=, >¢=:m;;;-; _t_‘ É · _ · `7_·Z "·; · _-3;-_1«LT_· I · tal- W1 7;. >. s 0 E ii; :-A · s1‘2:»$1e' ·» Q) U) III tn en 43 un §’ $· 8. 3, Si ~¤ St e % ,, %’ â E S Q, â ,_ N ¢ ID ,_ E E E ‘.‘3 ^ E Nbre de raclages par mouvement de creusement Fi ure 5 : Distribution relative des cadences de racla e au cours du creusement du nid 8 chez 19 Luths femelles aux pattes postérieures mutilees. 13
Influences sur la morphologie du nid. Nous avons mis en évidence une différence significative entre la profondeur moyenne des nids construits par des tortues aux pattes postérieures réduites à un ou deux moignons (55,8 cm) et celle des nids effectués par des individus aux pattes postérieures intègres (t:3.4, p<O.D5), Le calcul du volume des moulages des trois nids réalisés par des femelles aux pattes postérieures mutilées montre de profondes modifications par rapport aux nids construits par des femelles aux palettes intègres. ll convient en effet de noter une nette diminution du volume de la chambre d’incubation alors que celui du puits de ponte tend à augmenter: le volume de la chambre d'incubation du nid représenté dans la Figure 6 est de 9 litres pour un volume du puits de ponte estimé à 10 litres. Les proportions des deux parties du nid sont donc très nettement inversées par rapport au nid type d'une tortue ne présentant pas de mutilation. "·'¥·· 3/4 dc mm l/4 de tour Face tmtérieurc- 55cm ., l wi ht j _£;!lq,Ã' ro ro -4--î———> O 30cm Vue dc 3/4 arrière- ffuc dc 31'4 ztvzmt- 30cm l/4detour — Profil droit- Figure 6 : Exemple de nid aberrant construit par une Luth femelle dont la patte postérieure droite est réduite à un moignon (PD dans Yencadré). ,e nid, ici en grisé, a pu être observé sous toutes les faces grâce à un moulage. 14
Influence sur la durée de ponte. Nous avons observé Vaugmentation de la durée de ponte à 1 heure et 13 minutes (moyenne de la durée no1·male : 10 minutes et 14 secondes, écart-type = 98,99 s, étendue = 405-805, n = 23). Ce cas était chez une femelle présentant d’importantes mutilations aux deux palettes postérieures et n'ayant réussi à creuser qu'une simple cuvette en plus d'une heure. En fait la durée d'évacuation des oeufs était habituelle mais la tortue est restée dans la même position pendant plus de 45 minutes avant de commencer à pondre. Durant tout ce temps, elle était immobile, une patte postérieure en appui de chaque côté de la cavité réalisée. Influence des mutilations sur le comblement du nid. Lorsquïrne seule des deux palettes est réduite à un moignon, le tassement n’est réalisé au début que par la patte intègre. En effet, le moignon n'atteint pas le fond du nid mais il participe tout de même au comblement en entrainant du sable dans la cavité. Ensuite, u.ne fois que le niveau de sable dans le puits de ponte est suffisant, le moignon peut lui aussi participer au tassement même si son efficacité est réduite par rapport à une patte normale. Dans le cas ou les deux pattes sont transformées en rnoignons, bien que les mouvements paraissent assez désordonnés, le comblement est facilement réalisé du fait de la profondeur réduite de la cavité. Malheureusement, les oeufs sont dans ce cas souvent écrasés par les mouvements de tassement des pattes amputées. ` La durée moyenne du comblement chez les tortues aux pattes postérieures mutilées n’est pas significativement différente de celle observée chez les femelles aux pattes normales. Cependant, nous avons observé une durée de comblement très réduite (3 minutes et 18 secondes) : il s'agissait d'une femelle présentant d'importantes mutilations aux deux membres postérieurs (amputations au niveau des phalanges proximales pour une patte et des métatarsiens pour l'autre) et ayant creusé en guise de nid une simple cuvette peu profonde. IV. DISCUSSION Diverses observations de terrain nous permettent d'émettre l'hypothèse que le mouvement de creusement pourrait en partie résulter d'un certain "apprentissage" (acquisition d’expérience). Nous avons été témoin a plusieurs reprises d'aberrations de creusement qui se sont manifestées sans perturbations apparentes 1 elles se sont traduites chez des tortues aux membres sains par des arrêts du creusement suite à une incapacité à effectuer un mouvement efficace, ou bien par la réalisation de mouvements aberrants en début de creusement et devenant progressivement de plus en plus efficaces. Malheureusement, nous ignorons si ces individus étaient de nouvelles recrues venant nidifier pour la première fois de la saison ou même de leur vie, Il serait intéressant d’explorer plus avant cette hypothèse en comparant l'action de creusement des tortues âgées expérimentées à celle des jeunes et nouvelles recrues. A notre connaissance, seuls deux auteurs ont effectué une telle étude : il s'agit de Hirth et Samson (1987) ont étudié le comportement de nidification des Tortues vertes (Chelem}! mydas) sur la plage de Tortuguero au 15
Costa Rica. lls ont comparé les durées des différentes phases de la nidification chez des tortues de petite taille (jugées 'ïnexpérimentées" par les auteurs) et chez des tortues semblant plus âgées (donc "expérimentées") ; ils ont ainsi pu mettre en évidence une différence significative au niveau des temps du comblement et du brouillage. Selon ces auteurs, les femelles expérimentées sont plus méticuleuses lors du comblement et particulièrement au cours du tassement du sable recouvrant les œufs. A noter que Hirth et Ogren (1987) ont observé au Costa Rica qu'une Luth avait creusé pendant une heure un nid primitif de seulement 20-23 cm de profondeur. ll est intéressant de constater que les modifications de l'autopode (tarsiens et métatarsiens) du membre postérieur de la Tortue luth, considérées comme une adaptation à la nage, se révèlent particulièrement efficaces pour la réalisation des mouvements de creusement et de comblement et donc pour la construction du nid. ljallongement des orteils et leur réunion par une ample palmure forme une large " pelle " permettant une collecte et un rejet de sable relativement importants, et donc globalement un creusement efficace. A l'inverse, on constate les difficultés à collecter et à évacuer le sable qu'éprouvent des individus présentant des mutilations touchant l’orteil IV servant d’arrnature importante pour la large palmure s'étenclant de l’orteil V à l’orteil Ill. La surface de la palette lorsque les orteils sont écartés em éventail permet, quant à elle, le tassement efficace d’une quantité non négligeable de sable. Uempesage des orteils I, ll et Ill dans une palmure épaisse et rigide semble également être de toute première importance pour le raclage du sable comme nous pouvons le supposer à l’observation des individus aux mutilations touchant cette partie des palettes postérieures; les raclages deviennent alors inefficaces. La cadence de creusement est tout d'abord d'un mouvement imique de raclage puis passe à 2, 3 et 4 après rm temps de 7 à 14 minutes. Elle s'élève à 5 raclages au bout de 29 minutes, puis 6 raclages après un temps moyen de 31 minutes, mais dépasse très rarement 7 raclages. Une patte peut tenir une cadence pendant que l'autre patte voit la sienne augmenter. ljalternance des membres postérieurs au cours du creusement est très régulière même dans le cas d’une grosse mutilation à l'une des pattes. Nous n’avons trouvé aucune différence significative entre les nombres de raclages effectués par chaque patte. Dans le cas d’individus présentant un moignon et un membre intègre, nous observons un nombre de raclages plus élevé pour le membre mutilé mais un nombre identique de mouvements de creusement. Chez les femelles très blessées, le temps moyen de l'ensemble de la phase de creusement du nid est de 39 minutes et 39 secondes. Le temps de creusement est donc significativement augmenté par rapport au temps moyen de creusement d’une femelle aux palettes dépourvues de tout trauma (t=3.44, p<0.001). Pour les tortues présentant un ou deux moignons, Yaugmentation du temps de creusement par rapport aux individus aux pattes normales est encore plus importante 1 la moyenne est en effet de 70 minutes 16
et 22 secondes. Cette augmentation de la durée du creusement s'explique si l’on s'intéresse au nombre total de raclages réalisés pour l’élaboration d’un nid. En effet, pour une tortue aux membres postérieurs mutilés, il est en moyenne 1,5 fois plus élevé que le nombre de raclages effectués par une tortue aux palettes entières. Quant aux mouvements de creusement, ils sont également environ 1,5 fois plus nombreux. La différence est d'autant plus importante lorsqu'on s’intéresse seulement aux femelles présentant un ou deux moignons: le nombre total de raclages est alors en moyenne 3 fois plus élevé, pour un nombre de mouvements de creusement toujours 1,5 fois supérieur au nombre de mouvements réalisés pa r une femelle aux pattes normales. Nous avons constaté que les triples et quadruples raclages sont les plus fréquents chez toutes les tortues, que les pattes soient mutilées ou normales, avec 33,6% et 28,2% des raclages totaux. A noter cependant que parmi les 19 individus mutilés dont le creusement a pu être suivi dans sa totalité, 10,5% n'ont pas effectué de simple raclage. Pour les mutilations touchant les phalanges moyennes ou proximales d’un membre postérieur ou des deux, aucune différence significative des dimensions des nids n’a été noté avec celles des nids construits par les tortues aux pattes normales. Chez les femelles présentant une mutilation conséquente d’une palette postérieure (empêchant un raclage efficace), alors que l’autre n’a qu'une légère mutilation ou pas de mutilation du tout, la chambre d'incubation est dissymétrique. Elle est déviée plus ou moins fortement (suivant l’importance du trauma de la patte) du côté de la patte mutilée. La patte normale façonne correctement une partie de la chambre d'incubation alors que l'autre patte réalise un travail incomplet et peu efficace. Lorsque les mutilations des palettes postérieures sont peu conséquentes, elles ne semblent pas gêner le travail de construction du nid et nous n'avons pas noté de modifications de la forme de celui—ci par rapport à la forme de base obtenue chez des individus aux pattes normales. De plus, nous n'avons pas mis en évidence de différence significative entre les mensurations des nids des individus de ce groupe et celles des nids construits par des femelles aux palettes normales. Lorsqu’un seul des membres est atteint, nous constatons que deux cas sont possibles. Si l’amputation est située au niveau du métatarse, le moignon garde une certaine longueur et le fond du nid présente alors une forme en escalier : la palette intègre creuse un trou de la profondeur habituelle alors que la patte mutilée construit une cavité d’une profondeur réduite suite à la diminution de sa longueur. Lorsque la patte mutilée a atteint la profondeur maximale à laquelle elle peut creuser, elle continue à effectuer des mouvements de creusement à profondeur fixe, ce qui a pour effet d'élargir le puits de ponte ; le nid a alors une forme beaucoup plus massive, le puits de ponte ayant sensiblement la même largeur que la chambre d'incubation. ll n`existe plus de différence marquée entre le puits de ponte et la chambre d'incubation qui se fondent en une seule et même volumineuse structure. 17
Si l’amputation est plus haute (au niveau du tarse ou bien du tibia et de la fibula), le moignon présente une longueur très réduite et ne peut effectuer que des mouvements de creusement à vide;dans ce cas, le nid est entièrement creusé par la patte postérieure intègre et est très nettement dévié du côté de l a palette mutilée. Lorsque les deux pattes postérieures sont mutilées, l’une d’entre elles peut présenterunmoignon et l’autre être fortement mutilée ou également réduite à un moignon. Dans ce cas le creusement est évidemment rendu très difficile et le nid se transforme en une sorte de cuvette plus ou moins profonde selon l’importance des mutilations. Lorsque les pattes postérieures sont réduites à un ou deux moignons, les modifications de forme du nid sont particulièrement importantes et relativement variées suivant les degrés de mutilation rencontrés (Cf. Fretey 1981). Si la femelle parvient à creuser une cavité malgré ses mutilations, la ponte se déroule généralement tout à fait normalement et sa durée n’est pas significativement différente de celle observée chez des individus aux pattes postérieures intègres. Le Comblement ne semble pas beaucoup perturbé par les diverses mutilations des membres postérieurs. Nous n’avons pas mis en évidence de différence significative entre le nombre de femelles laissant pendre la patte gauche dans le nid à la fin du creusement et celui des femelles utilisant la patte droite. De plus, les tortues présentant une mutilation à un seul des membres postérieurs semblent laisser pendre indifféremment le membre normal ou le membre mutilé. V. CONCLUSION Nous avons vu que l’influence de la morphologie des pattes postérieures sur la forme du nid de la Tortue luth est évidente et que celle—ci est une véritable empreinte des membres et de ses éventuels traumas, Nous n’avonS pas trouvé dans la littérature d’étude comparable chez cl'autres espèces de Chéloniens nous pennettant des comparaisons. ll est de toutes façons à noter que le nid de Dermochelys coriacea est certainement le plus spectaculaire à étudier car étant le plus profond. L’observation de la construction du nid par des tortues aux pattes postérieures mutilées nous a permis de comprendre que d'importantes mutilations des membres postérieurs peuvent totalement compromettre le creusement du nid. Mais des mutilations assez restreintes peuvent également gêner considérablement le mouvement de creusement, d’autant plus qu’il s’agit d’un mouvement précis et de réalisation complexe (Gasc et al'., 1988). Ainsi, nous avons vu que la seule mutilation de l’extrémité distale des phalanges moyennes des orteils ll et III compromet le mouvement de creusement en empêchant la crispation du membre;cela est vraisemblablement dû à la section du muscle jlcxor longus digitorum qui vient normalement s'insérer sur les phalanges distales des orteils l, ll, III et IV. Comme nous l’avons décrit précédemment, une simple encoche au creux de la palmure interdigitale 18
joignant l'orteil III à I’orteil IV peut s'avérer très handicapante pour le creusement du nid. Fretey (1981) signale que les mutilations des pattes postérieures touchent un peu plus de 3% de la population de Tortues luths femelles de Guyane française ; il serait donc intéressant de s’interroger sur l'impact de telles aberrations de creusement. Ces aberrations ont—elles, par exemple, une influence sur le taux de réussite global de la reproduction de D. coriacea sur la plage de Yalhnapo, premier site au monde pour l'espèce ? REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Billes A. & Fretey ]. (sous pressœa) — Casting of leatherback turtles’ (Dermoclzelys coriacea Vandelli, 1761) nests. Marine Turtle Newsletter. Billes A. & Fretey ]. (sous presse-b) - Le nid chez la Tortue luth, Dermochelys coriacea (Vandelli, 1761). I. Le creusement. Rev. Pr, Aquariol. Billes A. & Fretey ]. (sous presse—c) - Le nid chez la Tortue luth, Dermoclielys coriacea (Vandelli, 1761). 1. Morphologie. Rev. Fr. Aaaariol. Bruno S. 1978 - Le tartarughe nei mari italiani e nel Mediterraneo. Natura e Moritagrza, 3 : 5-17. Fretey ]. 1981 — Note sur les traumas observés chez les Tortues luths femelles adultes, Dermorltelys coriacea (Vandelli, 1761) (Testudines, Dermochelyidae). Rev. Fr. Aqaariol., 8(4) : 119-128. Fretey j. 1993 — A technique for identifyinë adult female leatherback turtles bly to their iniuries. pp. 42-56. ln : roceecl. of the irst lnt. Congress oi Chelonian athology, Gonfaron, 25-27 april 1992. 290 p. Fretey ]. 8: Gaulejac S. de (à paraitre). Study of the direct impact of tourist behavior on the nesting sequence of Leather acl< Turtles at the Yalimapo nesting site (French Guiana). Marine Turtle Newsletter. Fretey ]. 8: Billes A. (à paraître) - Positioning of Dermoclzelys c0riacea' nest (Vandelli, 1761) in French Guiana. Gasc ]. P., Renotw S. & Lescure j. 1988 - Le mouvement des membres au cours du comportement de nidification chez la Tortue luth (Dermnclrelys rariacea). Etude préliminaire a la connaissance du répertoire moteur des tortues marines. Acta Zool. Cracezv., 31 (22) : 581-590. Hirth H. F. & Samson D. A. 1987 - Nesting behavior of Green Turtles at Tortuguero, Costa Rica. Carilz. ]. Sci, 23 (3-4) 1 374-379. Hirth H. F. &©gren L. H. 1987 - Some Aspects of the Ecoloây of the Leatherback Turtle Dermochelys rariacea at Laguna, Costa Rica. NOAA Techn. epart, NMFS 56 : 1-14. Hughes G. R., Bass A. ]. & Mentis M. T. 1967 - Further Studies on Marine Turtles in Tongaland, l. l.amm¢·rgeyer, 7 : 5-54. Rimblot F., Fretey ]., Mrosovsky N., Lescure]. 8: Pieau C. 1985 - Sexual differentiation as a function of the incubation temperature of eggs in the sea turtle Dermarhelys coriacva. /1mpl1z`bia—Rt·_z1t1'lia, 6 : 83-92. l\/lamlscrit accepté le 15 mars 2000 19
Bull. Soc. Herp. Fr. (2000) 93 ; 21-26 Etude et protection de Yherpétofaune d’une grande ville : l’exemple de Bruxelles par Christiane PERCSY Chemin du Bon Air, 12 — B—1380, Olmin (Belgique) Résumé - Une étude de Vherpétofaune bruxelloise a été effectuée de 1992 à 1997, La méthodologie adoptée pour cette grande ville est décrite ici et les résultats en sont brièvement exposés. Des mesures de gestion en faveur de l’hérpét0faune de Bruxelles, déjà prises ou à prendre, sont également mentionnées. Mots-clefs : Herpétofaune. Zone urbaine. Région de Bruxelles-Capitale. Evaluation quantitative de populations. Summary - Study and protection of herpetofauna in a large city : case for Brussels. The Brussels herpetofauna were studied from 1992 to 1997. Survey techniques for this large city are described, and the results . Recotiunendatitiiis are made to prevent urther decline of the species in Brussels. Key-words : Herpetofauna. Urban area. Brussels capital. Population determination. I. LA REGION DE BRUXELLES-CAPITALE Bruxelles et ses environs occupent un espace géographique diversifié, d'une altitude de 15 à 125 m, où alternent collines et vallées (la Senne et ses affluents). Administrativement, la Région de Bruxelles-Capitale Couvre environ 160 km2, comprenant le centre ville et les communes périphériques de Yagglomération, dont les plus externes constituent ce que l’on appelle couramment la “ceinture verte" de Bruxelles. En effet, la Région bruxelloise comporte, en son centre, une zone formée d’un tissu urbain continu, ponctué par quelques parcs publics. Mais, fait particulier, on y trouve aussi des îlots verts fermés : les maisons mitoyennes construites à front de rue cachent, à leur arrière, des jardins (souvent clos par des murs) qui forment, au centre des pâtés de maisons, des espaces verts parfois remarquables. Autour de cette zone centrale sfétendent des quartiers aux habitations plus ou moins dispersées et dont les jardins sont séparés seulement par des haies. Tous ces jardins privés représentent 25% du territoire de la Région bruxelloise l Bruxelles comporte plusieurs parcs et forêts publics, dont une partie de la célèbre Forêt de Soignes. De par son sous-sol sablonneux (sables bruxelliens du Tertiaire), la Région de Bruxelles—Capitale renferme aussi d'anciennes sablières, dont certaines sont aujourd’hui des friches abandonnées. 21
De par son oro—hydrographie, Bruxelles possède encore quelques zones humides 1 presque toutes ont été érigées en réserves naturelles ou transformées en parcs publics. Enfin, il ne faut pas négliger le réseau routier et ferroviaire qui morcelle le territoire mais est aussi parfois associé à des friches non dénuées d’intérêt. Au total, c'est ainsi quelque 50% de la Région bruxelloise qui sont occupés par des espaces verts (pour des informations plus précises, voir Gryseels 1998). II. UHERPETOFAUNE DE BRUXELLES—CAPITALE Grâce à la présence des espaces verts décrits ci—dessus, la Région bruxelloise abrite encore 10 espèces de notre herpétofaune indigène, deux autres ayant disparu assez récemment. Un bilan de l'herpétofaune actuelle de Bruxelles a pu être réalisé dans le cadre de la surveillance de la qualité de l’environnement en Région de Bruxelles—Capitale, financée par l'lnstitut bruxellois de Gestion de l’Environnement (l.B.G.E.) 2 “Raînne", section herpétologique de l’association Aves, a été chargée d'inventorier les espèces présentes et la plupart des sites qui en renferment des populations stables. Un rapport détaillé de ce travail est réalisé dans Percsy (1998). Voici les espèces présentes aujourd’hui en Région bruxelloise. Salamandre tachetée (Salamandre salamandre). L'espèce n’existe qu'en Forêt de Soignes ou ses abords immédiats. Cette hêtraie, parcourue de divers ruisselets, est l’habitat typique de l’animal. Triton alpestre (Triturus alpestris). Ce triton est répandu en Région bruxelloise. On le trouve même dans certains parcs ou dans des pièces d'eau artificielles de jardin. Triton ponctué (Triturus vulgaris). Même constat que pour le triton alpestre, mais il marque une préférence pour les points d’eau ensoleillés. Triton palmé (Triturus helveticus). En dehors de la Forêt de Soignes (où il est abondant), ce triton n'a été trouvé que sur un site qui en est totalement sépare. Crapaud accoucheur (Alytes obstetricrms). Six sites abritaient encore cette espece à Bruxelles dans les années 50. Il en subsistait trois dans les années 70 et aucun aujourd’hui ! Mais une population d’alytes se maintient à proximité immédiate de la Région de Bruxelles-Capitale. Par ailleurs, l’espèce a été introduite dans deux jardins bruxellois. Cest ainsi que, depuis une trentaine d'armées au moins, une population d’alytes se maintient dans un jardin clos, en plein tissu urbain l Notons que l’espèce se trouve, à Bruxelles, en limite septentrionale de son aire de répartition. Elle est donc particulièrement sensible aux modifications du milieu qui l'abrite (ombrage notamment). Crapaud commun (Bufo bufo). Il occupe tous les milieux susceptibles de lui convenir et résiste mieux que les autres batraciens à Yempoissonement des étangs. Cest la principale victime du trafic routier. 22
Complexe de grenouilles vertes (Rama esculenta et Rama lessonael. Ces grenouilles ont fortement régressé en Région bruxelloise 2 elles n'existent plus que sur un seul site, où elles ont d’ailleurs été (r ?)introduites fin des années 70 ou début des années 80. Grenouille rousse (Ram: temporaria). On la rencontre dans tous les milieux susceptibles de lui convenir, y compris dans les mares de jardin ou elle a parfois été introduite. Lézard vivipare (Lacertn vivipara). Diverses observations sporadiques, toujours à proximité des voies ferrées. Orvet (Anguis fragilis). Cette espèce discrète a néanmoins été signalée en divers lieux de la Région bruxelloise (le plus souvent aux alentours de la Forêt de Soignes). Deux espèces ont disparu assez récemment de la Région bruxelloise : le Triton crêté ( Triturus cristatus) est encore observé en Forêt de Soignes au début des années 60 et la Rainette verte (Hyla arborerz) jusqu’en 1970 (de Wavrin 1988a), Si le triton crête subsiste encore en région flamande, tout près de Bruxelles, la rainette, quant à elle, a disparu aussi des régions voisines. Nousy faisions déjà allusion plus haut, divers amphibiens et reptiles ont été introduits dans la région 2 c'est là un phénomène courant en zone urbaine. Beaucoup disparaissent rapidement (il y eut des lâchers de couleuvre verte et jaune ou de coronelle !) ; d'autres se maintiennent (alytes, grenouilles vertes et rousses cités plus haut). Il convient aussi de mentionner les introductions de Grenouilles rieuses (Rama ridibunda) (dont une population au moins est maintenant bien établie) et les lâchers de Tortues de Floride (Tmchemys scriptrt) dans divers points d’eau. Ill. METHODOLOGIE D'ETUDE D’UNE ZONE URBAINE L’étude réalisée à Bruxelles pendant les années 1992 à 1997 a été orientée vers des inventaires des sites potentiellement intéressants sur le plan herpétologique plutôt que vers un "atlas" de la région ; elle fut complétée, quand c’était possible, par des évaluations quantitatives. Ces choix s'expliquent à la lumière des éléments suivants. (1) En zone urbaine, de nombreux espaces sont prives et non accessibles. La prospection en de tels lieux nécessite des enquêtes systématiques auprès des particuliers : grande presse, journaux “toutes—boîtes", courriers personnels. Cette demarche lourde n’a pas été adoptée. (2) Diverses publications existantes (par exemple, de Wavrin 1974 à 1988b, Gallez—Richel 1990) fournissent des indications assez précises sur Vherpétofaune qui a existé sur certains sites. Ces publications, jointes à la cartographie des milieux présents à Bruxelles, permettent de présumer des sites d'intérêt herpétologique, voire même les espèces qui y sont présentes. (3) La régression évidente des espaces susceptibles d'abriter des amphibiens et reptiles entraîne Vurgence des mesures concrètes à prendre au sein de ces espaces: mener une gestion favorable à Yherpétofaune sur certains sites suppose une parfaite connaissance de Yherpétofaune de ces sites. 23
En conséquence, de 1992 à 1997, la plupart des sites potentiellement intéressants d'1m point de vue herpétologique (28 sites) ont été prospectés de manière systématique. Il faut y ajouter diverses données occasionnelles en d’autres lieux. Notons Vimportance, dans une telle démarche, des données négatives (absence d’une espèce), données trop souvent négligées par les observateurs. D’autre part, sur trois sites, des évaluations quantitatives ont été tentées. Si l'on exclut les techniques de marquage et de capture systématiques des animaux (techniques qui ne peuvent être appliquées à grande échelle), on peut envisager de suivre, cl'année en année, sur un site donné, les fluctuations de certains paramètres facilement observables, suivant des modalités constantes et bien déterminées. Le choix des paramètres et des modalités dépend de l'espèce étudiée, mais aussi du site d’observation. A Bruxelles, nous avons effectué le suivi quantitatif de certaines espèces sur certains sites pendant deux ou trois années consécutives (1992, 1993 et 1994). Ces relevés devraient être répétés périodiquement (tous les dix ans, par exemple), afin d’effectuer des comparaisons à long terme. Notons que Vinterprétation des variations numériques enregistrées doit étre prudente. Il est connu, par exemple, que les effectifs de Crapaud commun (Bufu hujii) peuvent varier fortement d’une année à l'autre (voir notamment Percsy 1994, 1995). Cest pour éviter l’influence de ces variations annuelles que nous proposons des relevés quantitatifs pendant deux ou trois années consécutives, a intervalles de 1U ans. Dans la présente enquête, les observateurs ont effectué des comptages de pontes de grenouilles rousses (juste après la période des accouplements), des dénombrements de tritons adultes à l'eau en pleine période de reproduction (observation nocturne à la lampe torche ou pose de nasses, suivant le type de milieu), des comptages d'adultes de crapauds communs en migration sur une route et des dénombrements de mâles chanteurs de grenouilles rieuses. Les résultats obtenus sur ces quelques années ne révèlent pas de variations significatives. Ils devront être comparés a des relevés ultérieurs, Outre l'espoir d’un suivi quantitatif ai long terme, ces résultats peuvent fournir des indications sur la vie des espèces concernées (par exemple, époque précise des pentes de grenouilles, sex—ratio des tritons nettement en faveur des mâles, etc...). Pour plus de détails, voir Percsy (1998). IV. UAVENIR DE IJHERPETOFAUNE URBAINE Ijétude réalisée à Bruxelles a mis en évidence cinq types de facteurs négatifs pour Vherpétofaune 2 - la destruction des milieux : urbanisation, remblais, drainage, "nettoyage" de friches ; — l’isolation des populations : fractionnement des milieux par des espaces infranchissables par les animaux ; — la mauvaise gestion des milieux : aménagements de berges d'étangs, entretien intensif de parcs et jardins, boisement; — la fréquentation intensive ou mal canalisée t piétons, V.T.T., automobiles ; 24
— Yintroduction d'animaux : poissons surtout, grenouilles exotiques et tortues de Floride, Pour lutter contre ces facteurs, les actions suivantes peuvent être envisagées à l’avenir. A. Mesures de gestion des milieux L’I.B.G.E. (Institut Bruxellois de Gestion de l'Environnement) a déjà pris des mesures demenagement dans certains parcs ou réserves naturelles (contrôle d'empoissonement, réaménagement ou curage de mares, canalisation du public, ...). La fermeture temporaire d'ur1e route traversée par des amphibiens a pu être obtenue. Les initiatives de ce type doivent être prolongées et multipliées. Elles devraient être complétées par des mesures d’z-iménagement du territoire préservant les milieux encore intéressants. B. Suivi des isolats de populations Il serait intéressant de déterminer les populations d’amphibiens 0.1 reptiles strictement isolées des autres et d’en effectuer un suivi précis. Une telle étude d'isolats présente un intéret scientifique certain et permettrait, le cas échéant, cl'envisager la recréation de connexions avec des populations voisines. A noter l'existence d'une population d'alytes, isolée en pleine ville, qui se maintient depuis 30 ans ! C. Encouragement à une ”bonne" gestion des terrains privés ljopération “Refuges Naturels" menée a Bruxelles par l'association a but non lucratif "Réserves Naturelles RNOB", avec le soutien de l'l.B.G.E., consiste a conseiller le particulier pour qu’i] gère son jardin ou sa propriété dans le respect de la nature. Cette opération a un franc succès. Le respect de Vherpétofaune (sans introduction l) y trouve sa place. D. Sensibilisation générale du public à Vherpétofaune de la région : expositions, conférences, informations sur les lieux de passage de migration d’amphibiens, Remerciements. L'étude ci-dessus a été réalisée grâce au soutien de l'lnstitut bruxellois de Gestion de Vlïnvironnement (l.B.G.E.), dans le cadre du programme de surveillance de la qualité de l’environnement bruxellois par bio—indicateurs. Nous remercions également des membres de Rainne qui ont participé a la collecte des données de terrain, pendant les six années de ce programme de surveillance. Vi. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Gallex—Richel C. 1990 ~ Quatorze sites semi-naturels cle la Region bruxelloise. Entente nationale de I’rotection de la Nature. 265 p. Gryseels M. 1998 - Natuur en groene ruimte in het Brussels Hoofclstedelijk Gewest, Iii : Qualité de |'Environnement et Biodiversité en Ré ion de Bruxelles-Capitale. Duciiirwiit du Tmvrail de l'Iiistitz.it des Srieiices Nritim·!!i·s dv Belêiqzw, 93 ; 1584. Percsy C. & N. 1994 - A propos des migrations de batraeiens. Actes de l'Université d’lÉté de la Nature 1993. Les Cahiers des Rëserzivs Naturelles RNOB, 7 : 109-114. 25
Percsy C. 1995 - Résultats des enquêtes "Migrations de batraciens sur nos routes" en Wallonie et à Bruxelles. Feuille de Contract Arves, 1/95 : 24-32. Percsy C. 1998 — Amlphibiens et Reptiles en Région de Bruxelles-Capitale. ln : Qualité de l'Environnement et iodiversité en Reëion de ruxelles-Capitale. Document de Travail de Vlnstitut des Sciences Naturelles de Be gique, 93 : 101-116. de Wavrin H. 1974 — Présence cle la salamandre en Forêt de Soignes. Les Natumlistes Belges, 55 1 181-195. de Wavrin H. 1978 - L'alyte accoucheur en Moyenne Belgique. Les Nrztumlistes Belges, 59 : 159-176. de Wavrin H. 1988a — Les batraciens de la Forêt de Soignes. Les l\lalrm2listes Belges, 69 : 1 13-144, de Wavrin H. 1988b - Mammifères, batraciens et reptiles : un statut souvent précaire. Réserves Naturelles, 5/88 : 149-150. de Wavrin H. 1991 — Les vertébrés ln : Le Kauwberg, visages d'hier et de toujours. SOS. Kauwberg, pp. 53-54. Manuscrit accepté le 5 décembre 1999 26
Bull. Soc. Herp, Fr, (2000) 93 : 27-36 Captures accidentelles de tortues marines par la flotille crevettière de Guyane française par Frédéric GUEGUEN Laboratoire d’Océanographie Biologique, Université de Bretagne occidentale, 29287 Brest Cédex (France) Résumé - Cinq espèces de tortues marines fréquentent les eaux côtières tropicales de Gu ane française. fin d’établir le niveau de vu nérabilité de ces différentes tortues aux chaluts benthiques employés par la fpécherie crevettièredgutyanaise, un total de 281 traits de chaluts expérimentaux ont été et ectués sur les fonds e à 60 m du plateau continental au cours de campagnes scientifiques de prospection conduites en 1992 et 1993. Des informations supp émentaires ont egalement été obtenues auprès des professionnels. Les principaux résultats montrent qu'en raison de sa petite taille et de son mode de vie enthique et sédentaire, l'espèce la plus vulnérable est la Tortue olivâtre. Toutes les captures accidentelles de cette espèce ont été effectuées sur des fonds de 30 à 50 m dans la région ouest du plateau continental qui constitue une aire dalimentation de cette tortue. Les données recueillies au cours e cette étude sont cependant limitées, et elles ne pemiettent pas d’en déduire le taux d'i.rnpact réel de la pêcherie crevettière guyanaise sur es différentes populations de tortues marines. Mots-clés :Tortues marines. Guyane française. Pêcherie crevettière. DET - Dispositif d'Exclusion de Tortues, Summary - Accidental captures of sea turtles during commercial shrimp trawiinâ in French Guiana. Five species of turtle occur in tropical waters off the coast of Prenc Guiana. ln order to establish the level of vulnerability of the different turtlcs to Guianan shrimp trawlers' gear, a total of 281 experimental trawls were conducted on the continental shelf at depths of 0-60 m during three surveys in 1992 and 1993. Further data were also obtained from conunercial trawls. Results showed that olive ridley turtles were the most vulnérable because of their small size, and benthic and sedentaëy behaviour. All accidental captures of the stpecies were made at deprths between 30 an 50m in feeding grounds on the northwest 0 the continental shelf. e limited data obtained during this survely did not allow the true impact of Guianan shrimp fishing on the different sea turtle popu ations to be determined. Key-words : Sea turtles. French Guiana. Shrimp fishing. Turtle Excluder Device — T ED, I. INTRODUCTION Quelques études récentes ont démontré la vulnérabilité de plusieurs espèces de tortues marines vis—à-vis de certains des engins de pêche employés par les pêcheries industrielles, notamment les chaluts benthiques des pêcheries de crevettes tropicales qui sont à l'origine de nombreuses captures accidentelles de tortues marines et d’un taux de mortalité important SUI' les différentes populations (Henwood & Stuntz 1987, Renaud et al. 1993). En Guyane francaise (Atlantique occidental tropical), les eaux chaudes côtières du plateau continental sont fréquentées par 5 espèces de tortues marines (Pritchard 1969, Schulz 1971, Fretey 1975, 1981, 1987, Marquez 1978, 27
1990) : la Tortue luth Dermochelys coriacea (Vandelli, 1761), la Tortue olivâtre Lepidochclys olivrzcea (Eschscholtz, 1829), la Tortue verte Chelunia mydrzs (Linnaeus, 1758), la Tortue imbriquée (ou caret) Eretmuchelys imbricatrz (Linnaeus, 1766), et la Tortue caouanne Carettrr caretta (Linnaeus, 1758). Par ailleurs, les fonds meubles du plateau continental guyanais compris entre 20 et 80 m de profondeur sont traditionnellement exploités par une flotille crevettière industrielle (]ones & Dragovich 1977, Venaille 1979, Dragovich 1981, Dragovich & Coleman 1983) composée actuellement d'environ 70 navires de type floridien équipés de chaluts de fond de type "Golfe du Mexique", i.e. des chaluts très peu sélectifs car ne disposant, malgré leur très faible maillage, d’aucun dispositif particulier de limitation des captures accessoires (Lemoine et al. 1982), comme par exemple le Dispositif d'Exclusion de Tortues ou D.E.T. ("Turtle Excluder Device", ou "Trawl Efficiency Device", TED,). Cependant, bien que de nombreux travaux aient déjà été publiés sur la biologie des différentes espèces de tortues marines venant se reproduire sur le littoral guyanais (Fretey 1975, 1978, 1981, 1986, 1987, Fretey, Lescure & Sanite 1986, Fretey 8: Girondot 1987), aucune étude n’avait encore été à ce jour consacrée au problème des captures accidentelles de tortues marines par la flotille crevettière exploitant le plateau continental de Guyane française. Cet article a pour objectifs, d’une part d’établir le niveau de vulnérabilité potentielle propre à chacune des différentes espèces de tortues vis-à-vis de l’engin de pêche employé par la flotille, et d’autre part, de tenter d’estimer l’impact de la pêcherie sur les différentes populations de tortues. Les résultats de cette étude ont été obtenus à partir de campagnes expérimentales de prospection ainsi que par Vintermédiaire d’une enquête menée auprès des professionnels. II. METHODE Une série de 3 campagnes expérimentales de prospection a été conduite en octobre 1992, mai 1993 et octobre 1993 sur Vensemble du plateau continental guyanais, depuis l'embouchure du fleuve Oyapock (frontière avec le Brésil) jusqu'à celle du Maroni (frontière avec le Surinam), et à des profondeurs comprises entre 0 et 60 m. Un total de 281 traits de chalut d’environ 30 minutes chacun, soit environ 136 heures de chalutage, a ainsi été effectué, à savoir 95 traits de chalut (soit 47 heures de chalutage) du 7 au 17 octobre 1992, 91 traits (43 heures) du 21 au 31 mai 1993, et 95 traits (46 heures) du 19 au 31 octobre 1993. La prospection a été réalisée à l’aide d’un navire et d’un engin de pêche similaires à ceux traditionnellement employés par la flotille professionnelle, i.e. un chalutier crevettier floridien (longueur : 20 m ; puissance motrice 2 450 CV) équipé d’un chalut plat à crevette (ouverture verticale : 0,90 m; corde de dos : 14,95 m ; maillage :45 mm). Parallèlement, une enquête a été effectuée entre mai et octobre 1993 auprès des 6 principaux armements composant la flotille crevettière industrielle, sous la forme d’un questionnaire à remplir lors de chaque capture accidentelle d’une 28
tortue marine. Les formulaires distribués à chaque capitaine de crevettier comportaient tous les renseignements (schémas, descriptions détaillées), permettant une identification aisée de l'espèce de tortue capturée ainsi que la détermination de son sexe. Pour chaque capture de tortue, un maximum d’informations concernant les paramètres relatifs à Vopération de chalutage (date, profondeur, position géographique, durée du trait) et les caractéristiques de la tortue capturée (espèce, sexe, taille, poids, état de l'animal : mort ou vivant) ont été recueillies. III. RESULTATS A. Campagnes expérimentales de prospection Les 281 traits de chalut effectués ont permis de recenser un total de 3 captures accidentelles de tortues olivâtres Lepidocizelys olivacea, à savoir 2 femelles au cours de la campagne d'octobre 1992 et 1 mâle lors de celle d’octobre 1993 (tab. 1). Les 2 individus femelles, d’une quarantaine de kilos 55° 54° 55** 52** 51**14/ 7. i __ M¤»*M1<zv¤ A ¤»····»···>i··· .. L C} ‘ ; GUYANE § ‘1ï<rf¤=fw (Z'?-E) 7 N I E ~ I IIBIIII | ai Q SUI r/ 6. Im `; I 6. :P¤mnmniS0 "‘~ 4 I f R IDG I mm • *° ’°t l [ J"-Lawnmfuillumni \\ mm l 5·· I _ \ sa ,· 5· C "W'ç \ 40 c I "J \ gif pmu: I ’"€üi?îFaÃa M l riwiçmss · gl l I 50km TG .S"·§`:oi3¢.s¢£îr!lQ)·¤p0cL « BRÉSIL | ·—·-——-··-...——.i...4. 55° 54** 53 · 52** 51 · W Figure 1 : Localisation des captures accidentelles de tortues marinœ sur le plateau continental de Guyane française au cours des campagnes expérimentales de prospection et ar la flolille crevetière industrielle. N 1 à 6 = numérœ d'idenliIication des tortues Fvoix Tableaul) 29
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chacune, ont été pêchées au large d’©rganab0 vers 06°01’N et 53°20’W sur des fonds d'environ 35 m. L’individu mâle, d’u.ne longueur de carapace de 71 on pour un poids d’environ 35 kg, a été capturé au large de Kourou aux environs des 1les du Salut (05°32’N et 52°31'W) vers 45 m de fond (fig. 1). Compte tenu de la courte durée des traits de chalut (environ 30 min), les 3 tortues étaient vivantes lors du virage sur le pont du crevettier ; elles ont été immédiatement remises à l’eau après la détermination de leurs caractéristiques biologiques. B. Enquête auprès des professionnels Parmi les 6 armements sollicités pour cette enquête, un seul a accepté de remplir le questionnaire et a déclaré avoir effectué 3 captures accidentelles de tortues marines (tab. l). Il s’agit de 3 individus mâles (1 en mai 1993 et 2 en juin 1993) de longueur de carapace de 70 cm, 57 cm et 55 cm, appartenant également à l'espèce Lepidociielys oliwzcen et capturés vers 30 m de fond au large d'©rganabo (soit environ 05°50'l\l et 53°10’W) (fig. 1). Compte tenu de la durée des chalutages effectués par les professionnels (environ 3 h de traîne effective sur le fond), une de ces trois tortues, celle capturée en mai, était par contre déjà morte lors du virage du chalut sur le pont du crevettier. IV. DISCUSSION A. Vulnérabilité potentielle des différentes espèces de tortues marines aux chaluts des crevettiers guyanais Bien que 5 especes différentes de tortues marines fréquentent le littoral guyanais, seules des captures accidentelles de tortues olivâtres Lepidochelys olivacea ont été recensées au cours de cette étude. La vulnérabilité potentielle des différentes espèces vis—à-vis des chaluts de la flotille crevettière guyanaise apparait donc variable, car elle est liée non seulement à l'abondance même de l'espece dans les eaux guyanaises, mais aussi et surtout aux caractéristiques biologiques propres à l'espèce, notamment son cycle de reproduction, son régime alimentaire, et sa taille (tab. II). En effet, le cycle de reproduction détermine les périodes de migration des individus femelles vers les zones côtières pour la ponte ; les risques de captures sont donc accrus à cette période, la flotille crevettière étant concentrée sur les fonds de faible profondeur du plateau continental. D'autre part, le type de régime alimentaire induit un comportement spécifique (espèces pélagiques ou à tendance plutôt benthique), et les espèces vivant au voisinage du fond sont les plus vulnérables aux chaluts des crevettiers (chalut plat de fond à faible ouverture verticale, inférieure à 1 m). Enfin, les espèces de petite taille et les juvéniles sont également plus exposés aux chaluts des crevettiers, toujours en raison de la très faible ouverture verticale de ceux-ci. La tortue luth Dermochelys coriacm est de loin l’espèce de tortue marine la plus abondante dans les eaux guyanaises. Le stock de femelles nidificatrices liées à la Guyane française est estimé à environ 15.000 individus (Fretey 1987), et les plages du littoral ouest (plages de la Pointe isère, d’Awara, des Hattes-Awala Yalimapo, etc...) constituent un des sites de ponte de la tortue 32
luth les plus importants au monde (Pritchard 1969, Schulz 1971). Cependant, sa grande taille et son mode de vie pélagique limitent fortement la vulnérabilité de cette espèce aux chaluts de fond des crevettiers, excepté peut- être pour les juvéniles et les jeunes adultes (Henwood & Stuntz 1987), et aucune capture accidentelle n’a été inventoriée au cours de cette étude. Bien que potentiellement vulnérables aux chaluts des crevettiers compte tenu de leur taille et de leur mode de vie plutôt benthique, aucune prise de tortue irnbriquée Erétmochelys imbricntn ni de tortue caouanne Carettcl caretta n’a non plus été recensée en Guyane lors de cette étude. En effet, la tortue imbriquée fréquente sunout les eaux claires aux fonds très rocheux oÃ1 elle se nourrit, et sa présence est rarissime dans les eaux souvent turbides du littoral sablo—vaseux de Guyane française (Pritchard 1969, Schulz 1971, Fretey 1987). Les pontes de tortue caouanne sont également très rares et leur fréquence tres irrégulière sur la cote guyanaise (Schulz 1971, Fretey 1975, 1987). La tortue verte Chelrmia mydas se distingue par son régime alimentaire surtout végétarien. Son mode de vie plutôt sédentaire ainsi que sa présence au niveau des herbiers marins et des champs d'algues en font également une espèce potentiellement vulnérable aux chaluts de fond. Cependant, bien que plus de 100 pontes annuelles soient parfois répertoriées sur le littoral de Guyane française (Fretey 1987), et que l’existence d’un cheptel assez important ait été mise en évidence déja à plusieurs reprises aux alentours des Iles du Salut, au large de Kourou (Fretey 1981, 1987), aucune capture de tortue verte n'a été recensée dans cette étude. ll est probable qu'en dehors de la période de reproduction, les individus de cette espèce restent cantonnés au niveau de la zone très rocheuse située autour des lles du Salut, qui est riche en algues et herbes marines dont ces tortues se nourrissent, mais impraticable aux engins trainants des crevettiers. Finalement, seule la tortue olivâtre Lcpidnrlielys ulivareii, avec près de 500 nids observés certaines années sur les côtes guyanaises et surinamiennes (Schulz 1971), est apparue tres vulnérable aux chaluts de la flotille crevettiere. Plusieurs individus ont été capturés au large de leur site de ponte, dans la partie ouest du plateau continental comprise sur des fonds de 30 âi 50 m et caractérisée par des sables grossiers recouverts de débris coquilles et parsemés de petits massifs coralliens (Durand 1959, Abbes et nl. 1972). Cette portion du plateau continental, particulierement riche en petits poissons, crustacés et divers mollusques bivalves et gastéropodes, constitue une aire dalimentation pour cette espèce de tortue au régime omnivore (Pritchard 8: Trebbau 1984, Fretey 1987), Sa petite taille et son mode vie benthique au niveau de la zone littorale augmentent d'autant sa vulnérabilité aux chaluts des crevettiers. 33
B. Impact de la pêcherie crevettière guyanaise sur les populations de tortues marines Les résultats obtenus au cours de cette etude permettent difficilement d'effectuer une estimation du niveau d'abondance des captures de tortues marines par les crevettiers exploitant le plateau continental de Guyane française. En effet, les informations recueillies auprès des professionnels sont trop succinctes pour être utilisées dans tout calcul d'inférence permettant d'estirner l'impact réel de la pêcherie crevettière guyanaise sur les différentes populations de tortues marines. Un seul des six principaux armements guyanais semble avoir réellement participé a l'enquête de recensement, mais rien ne prouve qu’i] ait fourni une information exhaustive de l'ensemble des captures accidentelles de tortues marines de ses huit crevettiers. L'analyse des résultats des 3 campagnes expérimentales de prospection laisse cependant supposer un niveau de capture de tortues marines élevé, puisque 3 individus ont été pêches accidentellement en seulement 136 heures de chalutage. De plus, un sondage réalisé de maniere très informelle directement auprès de certains capitaines et membres d'équipage des crevettiers laisserait suggérer une prise annuelle d’environ 12 tortues marines par bateau (ce qui représente une capture totale de l’ordre de 1.000 tortues pour l'ensemble de la flotille), principalement des tortues olivâtres Lcpidochclys olivritrrz, secondairement des tortues vertes Clzelonizz mydas, et très rarement de jeunes tortues luths Dermochelys coriaccn. Ce taux de capture par bateau semble tres supérieur aux estimations établies par des observateurs du M.l\l.F.S. ("National Marine Fisheries Service") dans le Golfe du Mexique où les captures accidentelles de tortues marines n’atteignent qu’environ 2 individus par crevettier et par an, ce qui représente toutefois une prise totale annuelle de près de 13.000 tortues pour Vensemble des 5.500 crevettiers de cette pêcherie (Henwood & Stuntz 1987) ; les espèces pêchées sont essentiellement des caouannes Czzretta crzretta (83% des captures), secondairement des tortues de Kemp Lcpidochelys kempii (13%) (Henwood & 'Stuntz 1987), cette derniere espèce étant très voisine de la tortue olivâtre rencontrée sur les côtes guyanaises. ll a ainsi été établi sans conteste par plusieurs études que les captures accidentelles de tortues marines par les crevettiers des exploitations industrielles constituaient une des causes principales de leur mortalité (Henwood & Stuntz 1987, Renaud et al. 1993). En conséquence, la loi américaine impose depuis 1989 l’utilisation d'un dispositif de limitation des captures accessoires, à savoir un T.E.D. ("Turtle Excluder Device"), à l'ensemble de la flotille crevettière des Etats-Unis travaillant dans le Golfe du Mexique (dans les eaux territoriales de la Caroline du Sud jusqu’au Texas), et il est probable que les U.S.A. demandent prochainement une extension de cette législation à l'ensemble de leurs partenaires commerciaux, dont la Communauté Européenne. Ainsi, le refus manifeste de participation à l'enquête de recensement des captures de tortues de la part des professionnels guyanais est vraisemblablement lié à la crainte des conséquences d’une telle étude, 34
notamment l’obligation d’utiliser dans l’avenir un T.E.D. En effet, la pêcherie crevettiere guyanaise est entrée en situation de crise grave ces dernières années, notamment en raison d’une conjoncture économique défavorable, induite par la concurrence de certains pays producteurs de crevettes d'aquaculture en Asie et en Amérique du Sud, et exacerbée par la baisse de rentabilité de la pécherie observée chaque année en saison sèche (Abbes et til. 1972, ]ones Sx Dragovich 1977, Venaille 1979, Dragovich 1981). Or, l'installation d’un T.E.D. représente non seulement un certain coût pour les armateurs, mais elle induit surtout une perte de rentabilité d'environ 1U% sur les captures de crevettes (Renaud et al. 1993), ainsi qu’une réduction très sensible de l'cnsemble des prises accessoires, représentées en Guyane par de nombreuses especes de poissons appartenant aux familles des Sciaenidae ("acoupas") et des Ariidae ("poissons—chats" ou silures) (Lemoine et al. 1982) et qui constituent traditionnellement la godaille de l'équipage et donc une source de revenu supplémentaire non négligeable. V. CONCLUSION Les résultats obtenus au couts de cette étude indiquent que parmi les 3 espèces de tortues marines les plus abondantes dans les eaux guyanaises, la tortue olivâtre semble :2 priori la plus vulnérable aux chaluts benthiques des crevettiers professionnels exploitant le plateau continental. Cependant, la majorité des traits de chaluts expérimentaux analysés lors de cette étude ont été effectués au mois d'octobre (en 1992 et 1993), i.e. en dehors de la saison de reproduction, ce qui limite d'emblée les éventuelles captures accidentelles non seulement de tortues vertes qui à cette époque de l’année restent cantonnées aux alentours des lles du Salut qui constituent une zone très rocheuse et difficilement accessible aux chalutiers, mais aussi de tortues luths qui demeurent en pleine mer durant cette même période ; il est toutefois vraisemblable que ces deux dernières espèces soient également vulnérables aux clialuts des crevettiers pendant la pleine période de reproduction, principalement de mars à août. C'est pourquoi les résultats de cette étude préliminaire mériteraient d'être confirmés et surtout complétés par de nouvelles campagnes expérimentales moi.ns restrictives et réparties sur une année complète, voire encore par des embarquements réguliers d’un personnel observateur à bord des différents chalutiers composant la flotille crevettière industrielle de Guyane française. Remerciements. Cette étude a été réalisée avec l’aide financiere de la Commission des Communautés Européennes. L'auteur remercie l'ensembîe du personnel du laboratoire de la station Ifremer (institut français de recherche et d’exploitation de la mer) de Cayenne ayant contribué à cette étude, notamment ]. Achoun, H. Da Silva, ]. Kopp et V. Vauclin pour leur participation aux campagnes expérimentales en mer, ainsi que ]. Rosé pour ses nombreux conseils 35
VI. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Abbes R., Aldebert Y., Dorel D., Leroy C., Le Men R., Prado ]. 8: Saint-Félix C. 1972 - Reconnaissance des fonds de pêche de la Guyane française. Campagne de la "Thalassa" dans la région Antilles-Guyane. Science ci Pêche, Bull. Inst. Pêches Marit., 210 : 1-22. Dragovich A. 1981 - Guyanas-Brazil shrimp fishery and related U.S. research activity. Mur. Fish. Rev., 43 2 9-18. Dragovich A. 8: Coleman li.M. 1983 - Participation of U.S. trawlers in the offshore shrimp fisheries of French Guiana, Surinam and Guyana, 1978-79. Mnr.FishRev., 45:1-9. Durand]. 1959 — Notes sur le plateau continental guyanais: les éléments principaux de la faune et leurs relations avec le fond. Cnh. Orstom, 3 L 1-93. Fretey ]. 1975 - Les Chéloniens de Guyane française. Bull. Soc. Zoo!. I-`r., 100 1 674-675. Iiretey ]. 1978 - Mensurations de tortues luths femelles adultes Dermocheiys ceriacva (Linné), en Guyane francaise. Bail. Sec. Zool. Fr., 103 : 518-523. Fretey ]. 1981 - Tortues marines de Guyane. Léopard d'©r, Paris. 136 p. Fretey ]. 1986 - Le statut des tortues marines en Guyane francaise. hi : Le littoral guyanais. pp. 179-190. Sepanguy, Sepanrit, Cayenne. Fretey]. 1987 - Les tortues de Guyane française : données récentes sur leur systématique, leur iogéographie, leur éthologie et leur protection. Nature Guyanaise, Sepanguy, Cayenne. 141. p. Fretey I. & Girondot M. 1987 - Recensement des pontes de tortue luth, Derimichelys coritici·a (Vandelli, 1761), sur les glalges de Yalimapo~Les Hattes à Awara (Guyane française) pendant la saison 1986. ul . Soc. Herp. l~`r·., 43 : 1-8. Fretey J., Lescure j. & Sanite L. 1986 - Fonctionnement de l'écloserie d'oeut's de tortues luths des Hattes—Yalimapo (Guyane française). In : Le littoral guyanais. pp. 191-196. Sepanguy, Sepanrit, Cayenne. Henwood 1`.A. 8: Stuntz W.E. 1987 - Analysis of sea turtle captures and mortalities during commercial shrimp trawling. Fish. Bu I., 85 : 813-817. ]ones A.C. 8: Draïovich A. 1977 - The United States shrimp fishery off northeastern south America (1972-7 ). Fish. Bull., 75 : 703-716. Lemoine M., Vendeville Ph. Sr Ladurelle C. 1982 - Examen des prises accessoires de la Guyane francaise. Science et Pêche, Bull. Inst. Pêches Marit., 324 : 1-11. Marquez R. 1978 - Sea turtles. hi r FAO species identification sheets for fishery purposes. Vol. 6. Western Central Atlantic (fishing area 31). Fisher W. (ed,). FAO, Rome. Non paginé. Marquez R. 1990 - FAC) species catalogue. Vol. 11. Sea turtles of the word. An annotated and i lustrated catalogue of sea turtle species known to date. FAO Fish. Synopsis, 125 : 1- 81. Pritcharcl P.C.H. 1969 - Sea turtles of the Guianas. Bu}!. Fhz. State Mus., 13 : 85-140. Pritchard P.C.H. 8: Trebbau P. 1984 - The Turtles of Venezuela. Soc. Stud. Ampli. Rcpt., 2 : 1-403. Renaud M., Gitschlag G., Klima E., Shah A., Koi D. 8: Nance ]. 1993 - Loss of shrimp by turtle excluder devices ('l`EDs) in coastal waters of the United States, North Carolina to Texas : March 1988-August 1990. Fish. Bull., 91 : 129-137. Schulz ].P. 1971 - Nesting beaches of sea turtles in west French Guiana. Proc. Koninkl. Neder. Aknri. Weieiisch., 74 : 398-404. Venaille L. 1979 - La pêcherie de crevettes pénéides du plateau guyane-brésilien. Science et Pêche, Bull. Inst. Pêches Marit., 297: 1- 8. Manuscrit accepté le 1€' mars 2000 36
Bull'. Soc, llcrp. I-`r. (2000) 93 ; 37»43 Observations préliminaires sur Pherpétofaune de la République de Djibouti par Roland VERNET Laboratoire d'écol0g1'e UMR 7625, 46 rue aI'Ulm 75230 Paris cedex 05 (France) — E—mail : verrzet@bi0l0gic.ei1sfr Résumé - Dans le cadre d'une mission prosîective sur lherpétofaune de Djibouti, effectuée dans le sud du pays (région d'Ai Sa ieh), nous avons recensé et collecté 9 espèces de lézards, dont 3 sont mentionnées pour la première fois de ce pays, et 3 especes de serpents, dont deux sont également mentionnées pour la première fois. Mots-clés : Herpétofaune. République de Djibouti. Summary - Preliminary study of the herpetofauna in Djibouti. During an herpetological survey in the southern part of Djibouti (Ali Sabieh), nine species of liza rd (three new country records) and three of snake (two new country records) were observed and collectecl. Key-words: Herpetofauna. Republic of Djibouti. I. INTRODUCTION Si 1'herpétofaune de l'Ethiopie et celle de la Somalie ont été particulièrement bien étudiées depuis la fin du 19ÈmE siècle, paradoxalement, les domiées concernant lherpétofaune de Djibouti sont très rares et restent très parcellaires (Boulenger 1897, Lanza 1978, 1988, Schâtti 1989). Dans le cadre dun programme de la CEE 1 "Ecologie dans les pays en voie de développement", j'ai effectué une mission préliminaire à Djibouti, en juin 1993 sous l'égide cle l'©ffice National du Tourisme et l'Artisanat (ONTA) et du Service de la Protection des Sites et de l`Environnement (SPSE) de Djibouti (Anonyme 1991). Sonbut premier était de démarrer un inventaire de la faune reptilienne et la mise au point d'une méthodologie pour effectuer un recensement à long terme avec lélaboration d'un protocole dïdentification et cle classement. Les autres aspects de cette mission étaient d'initier de futurs observateurs ou récolteurs aux techniques déchantillonnage, de capture, dobservation et de reconnaissance des espèces reptiliennes et de réfléchir aux possibilités de diffusion des connaissances acquises vers un plus large public dans le cadre de : 1/ l'éducation à Venvironnement, et 2/ de la prévention ou des traitements en ce qui concerne les espèces venimeuses (Vernet 1993). 37
II. REGION PROSPECT EE Ce premier inventaire a été entrepris dans une zone située au sud-est d'Ali Sabieh en région montagneuse, d'altitude moyenne (8004000 m), dont le point culminant est à 1296 m (Mont Arrey) (fig. 1). Ã, ` dœsopmam Iousu Ali -_ # · _ _. ·à i". ,..> _~•-•· um ` N «·\\ \~. ··1 ; ' HL. xl nlntnu de Desscym -l/ ô J' ( rg ijlame de Dod: nm nlaluuqo Dim / 'gfnixm au Aymaou dèurvssnans 6`AIIUI plateau d’0b¤ck fi ti monts gui? · ' _ r·:..·.:,îÃbcî7 °···*· Ermonz Q · *-·•· ,«—··x_- f' mont nam '“°““ · G°"°"°‘*’°"° Dllltiudnïgggr \~q· *h“j@> ’ huhu. :] .pInlncœD¢r-¢In© \ _ / ‘*Q\ \} vu DMGITI lill l nlnteau ne Gnrnté Q " 2 Mmmm N \ ï pIat•nud•Na¢··L•‘: mm À " tf X \ mnstfm · · I. s "";ë;°° °"‘“ agatnu ne svn-nm (B jb mm / : F. ny! · É ¤j:•œ¤uG¤¤¤¤•,:.,( gum] X _"Ll*···}' 0 s un us 20 :5 km Figure 1 : Carte de Djibouti. Les noms encadrés correspondent à la zone étudiée. Le substrat est constitué de roches sédimentaires (calcaire et grès) avec des intrusions rhyolitiques et basaltiques. La végétation, à moyenne altitude, est constituée d'une steppe arbustive à Acacia mellzferrz et Acacia tm/tilis et, dans les parties les plus basses, d'une steppe herbeuse à Lasiurus scirzdicus, Pamcrmz tzcrgitrmz, Cymbopogori sclzoenanflnas et Aerzrn javanica (Anonyme 1991). Le choix de cette région s'était imposé par le fait quelle avait déjà fait l'objet d'études antérieures sur le plan floristique et faunistique (oiseaux, macro—mammifères) toujours dans le cadre du programme "Aires-protégées" du SPSE. La redécouverte dans ce secteur d'une espèce de gazelle, le "beira" (Dorcretmgus mega10tis),considérée jusqu`alors comme disparue de Djibouti, 38
avait fourni un regain d'intérêt à la poursuite des inventaires faunistiques dans ce secteur. Ce sont essentiellement les oueds Wada Weyn et Obodley (= oueds secs) et l'oued lnki Eyla (= oued humide) qui ont été prospectés. ijinventaire d'un deuxième site retenu par le projet initial (oued d’une zone littorale à proximité immédiate de Djibouti) n'a pu être réalisé suite aux températures excessives qui régnaient à l'époque de la mission (période estivale). III. ESPECES OBSERVEES Nous avons observé et récolté douze espèces dont deux Gekkonidés (genre Pristiiriis et Ptyodactylus), trois Agamidés (genre Agamzi, Acniithocercus et Umiimstix), deux Scincidés (g. Clmlcides et Mribuyrz), deux Lacertidés (g. Latiistin et Pscudcremins), un Elapidé, non conservé (probablement Nnja lmje), un Colubridé (g. Psmrnmophis) et un Vipéridé (g. Echis). Tous les spécimens récoltés ont été déposés au Muséum National d'l·listoire Naturelle de Paris et entrés en collection par Ivan lneich dans les catalogues de cet organisme. Les numéros attribués pour cette opération sont mentionnés pour chaque individu. Lcq = longueur bouche—cloaque ; Lt = longueur totale (en cm). 1. Lézards A. Gekkonidés — Pristiirus flzzvipimctntus Ruppel,1835 Un individu trouvé dans l'oued Wada Weyn, (Lcq=3,3; Lt=6,7), MNHN 1996.220. Espèce déjà signalée de Djibouti par Lanza (1978 8: 1988) et Schâtti (1989) - Ptyodactyliis lmsselquistii (Donndorff, 1798) Un individu trouvé dans l'oued Obodley, (Lcq=3,4; Lt=6,3), MNHN 1996.221. Espèce déjà signalée de Djibouti B. Agamidés - Agrmm spinosa Gray,1831 Un individu trouvé dans l'oued lnki Eyla, MNHN 1996.230. Espèce déjà signalée de Djibouti. — Acantlzocercus rmnectmzs (Blanford, 1870). Espèce très commune. Quatre individus trouvés dans l'oued Wada Weyn, MNHN 1996.222-225 et quatre individus trouvés dans l`oued lnki Eyla, MNHN 1996.226-229 Espèce déjà signalée de Djibouti. - Ummastyx macfndyeni Parker,1832 Un individu trouvé dans l'oued Wada Weyn, (Lcq=10,2; Lt=19,4), MNHN 1996.23]. Espèce déjà signalée de Djibouti (Schâtti 1989). 39
C.Sci11cidés — Chalcides mgazzii Boulenger,1890 Un individu trouvé dans l'oued Obodley, (Lcq=11,0; Ltzqueue coupée), MNHN 1996.239. Espèce non encore signalée de Djibouti. — Mabuycz quiriquetaeniata (Lichtenstein,1823) Espèce très fréquente dans l'oued Wada Weyn. Deux individus récoltés 1 unjuvénile (Lcq:4,0; Lt:11,2), MNHN 1996.240 et un adulte (Lcq=9,7; Lt=25,()), MNHN 1996.241. Espèce déjà signalée de Djibouti (Schàtti 1989). D. Lacertidés - Latastia longicaudatrz (Reuss,1834) Espèce assez fréquente. Un individu capturé dans l'oued Wada Weyn, (Lcq:4,6; Lt=14,8), MNHN 1996.233 et un autre dans l'oued Obodley, MNHN 1996.234. Espèce non encore signalée de Djibouti. - Pseudcrcmins mucromztn (Blanford, 1870) Espèce également très fréquente. Quatre individus capturés dans l'oued Obodley : (Lcq:4,7; Lt=15,7), MNHN 1996.235 ; (Lcq=4,8; Lt:16,8), MNHN 1996.236 ; (Lcq=4,9; Lt:16,5), MNHN 1996.237 ; (Lcq:3,9; Lt=l4,3), MNHN 1996.238. Espèce non encore signalée de Djibouti. 2. Serpents A. Elapidés - Najn haje (Linné, 1758) Restes décomposés d`un individu découvert dans la région d‘Ali Sabieh. Non récolté. Espèce non encore signalée de Djibouti. B. Colubridés — Psmmnnpliis biseriatus Peters, 1881 Un individu trouvé dans l'oued Wada Weyn, MNHN 1996.242. Espèce non encore signalée de Djibouti. C. Viperidés · Eclzis pymmidum (Geoffroy Saint—Hilaire,182’7) Un individu trouvé dans l`oued Wada Weyn, MNHN 1996.243. Espèce déjà signalée de Djibouti. 4(J
IV. DISCUSSION-CONCLUSION En préparation à cette étude sur le terrain, une cinquantaine de références bibliographiques avaient été recensées concernant lherpétofaune de la Somalie et 42 sur Fherpétofaune éthiopienne dont plusieurs ouvrages ou articles de synthèse (Parker 1942, 1949, Lanza 1978, 1988, Schàtti 1989, Spawls 1992). En 1988, Lanza avait inventorié 203 espèces de reptiles pour la République Démocratique de Somalie (10 Testudinidae, 1 Crococlylidae, 118 Sauriens et 85 Ophidiens) avec 39,6% d`endémiques pour ce pays. Hillman (1989) avance le nombre de 82 espèces de serpents pour l'Ethiopie dont 7 endémiques. Quelques rares références concernent la seule faune de Djibouti (Boulenger 1897, Lanza 1978, 1988, Schàtti 1989). A partir de l'analyse de ces articles, j'avais estimé pouvoir rencontrer à Djibouti environ 6 espèces de tortues (marines pour la plupart), 71 espèces de lézards et 35 espèces de serpents (dont 6 venimeuses et dangereuses). Cette liste avait éte établie sans tenir compte des remaniements constants de la systématique des reptiles au cours de ces 15 dernières années. Par ailleurs, l'étroitesse des aires de distribution de certaines espèces décrites nous invitait à la plus grande prudence en ce qui concerne les nombres d`espèces avancés. En dépit de la durée relativement courte de la mission, j'ai pu recensé de façon certaine 9 espèces de lézards (dont trois nouvellement signalées) et 3 espèces de serpents (dont deux, nouvellement signalées). Au cours de la mission, i'ai pu noter à plusieurs reprises, les similitudes d'habitats entre les espèces djiboutiennes et les espèces sahariennes. Toutefois la fréquence d'observation des serpents et de certains sauriens (les Lacertidés en particulier) m'a semblé plus faible que celle observée dans les zones arides d`Afrique du Nord (Vernet & Grenot 1972, Grenot Sr Vernet 1972). Notons toutefois, qu'à Djibouti, nos relevés ont été effectués au cours d'une période très courte et de surcroît très chaude, (températures moyennes comprises quotidiennement entre 40° et 43°C), ceci pouvant induire chez de nombreuses espèces des ralentissements d'activité, voire des processus d'estivation. Outre leur diversité spécifique, les Agamidés étaient représentés par des populations relativement denses. Ces lézards montrent des caractéristiques comportementales et sociales très marquées (vie en groupe, hiérarchisation sociales et sexuelle, comportements agonistiques, défense des territoires, ...) dont l'intérêt pourrait être exploité sur un plan pédagogique ou écotouristique dans le cadre d'un programme d'éducation à lenvironnement. D'ores et déjà, certaines espèces semblent dignes d`intérêt et nécessiteraient certaines mesures de protection. Après enquêtes et discussions avec les autochtones, il est fort probable que cette région soit fréquentée par Va rrmus rilliigiilaris, mentionné par Scliàtti (1989), bien que nous ne l`ayons pas réellement observé, sinon sous forme de traces qui peuvent lui être attribuées. Signalons que cette espece, comme tous les Varanidés, est répertoriée au moins à l`annexe ll de la Convention de Washington et que ses populations mériteraient d'être protégées dans bien des régions d'/Xfrique, y compris dans cette région à vocation de patrimoine naturel. ll en est de même pour les 41
représentants du genre Uronmsfyx, dont nous n`avons rencontré qu'un seul individu. La faune herpétologique de Djibouti est intéressante à tous points de vue, de par sa diversité potentielle et de par son appartenance à un secteur biogéographique bien particulier. Cette mission aura permis d'ajouter cinq espèces non encore recensées dans l'inventaire de la faune djiboutienne. Toutefois, elle n'aura d'intérêt que si elle trouve une suite logique dans l'avenir permettant d'accroître nos connaissances sur : 1/ la composition spécifique et la répartition, plus précise des différentes espèces, tant sur le plan longitudinal, latidudinal, qu'altitudinal, 2/ sur le taux dendérnisme, 3/ sur le statut de ces espèces (fréquence, rareté...) et 4/ sur l'intensité des pressions de sélection pouvant modeler la dynamique des populations, leur extension, leur régression ou leur extinction. lfidentification future d'espèces nouvelles pour ce pays permettra d'élargir ce premier inventaire mais, pour cela, il semble indispensable de pouvoir poursuivre cette enquête à l'échelle du territoire tout entier, en souhaitant qu'une amélioration de la situation politique du pays favorise des investigations dans les secteurs du nord où nous n'avons pas pu nous rendre et ou les milieux naturels sont également très diversifiés. Remerciements. A Alain Laurent et Brice Mallet, responsables du projet et qui m'ont invité à effectuer cette mission. Merci également à Iloussein Abdillahi, Ali Houmed, Nicolas Prevot, Djima Guireh qui m'ont accompagné sur le terrain et ont activement participé au repérage des individus. Mes remerciements vont également à Ulrich Ioger qui m'a aidé à identifier les Agamidés, ainsi qu`à Ivan Ineich qui a bien voulu vérifier les autres espèces et entrer tous les spécimens récoltés dans les collections du Muséum National d'Histoire Naturelle. V. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES Anonyme 1991 — Rapport National Environnement Djibouti 91. Document élaboréîpour la conférence des Nations-Unies sur lenvironnement et le dévelo ent (CNU D 92). Secrétariat Technique du Comité National pour lllnvironnement SNBPA/SPSE. 50 p. Boulerltger CLA. 1897 — Description of a new lizard from Obok : Ercmias nmrtini. Ami. Mag. at. Hist., 19(6) : 467-468. Grenot C, & Vernet R. 1972- Les Reptiles dans Vécosystème au Sahara Occidental. C. R, Sur. Biogéugr., 433 : 83 — 96. Hillman ].C. 1989 - Checlelist of Ethiopian snakes. Ethiopian Wildlife Conservation Organisation. Cyclostyled report. Lanza B. 1978 — On some new or interesting east african Amphibians and Reptiles. Monitors ZOOI. Ital., 14 : 229-297. Lanza B. 1988 - Am hibians and re tiles of the Somali Democratic Republic : checklist and biogeography. Bliogeographia, 16): 407-465. Parker HW, 1942 - The lizards of British Somaliland. Bull. British Museum, 91 : 1-101. 42
Parker H.W. 1949 - The snakes of Somaliland and the Sokotra Islands. Znnlngisclw Verlmiidclingmz, Leiden,. 6 : 1-115. Schàtti B. 1989 - Amphibien und Rc tilien aus der Arabischen Republik jcmen und Djibouti. Rumw Suisse de Zoologie, 96 El) 1 905-937. Spawls S. 1992 — 111e snake fauna of Ethiopia, a preliminary report. ]. Hurpvtol. Assoc. Af}., 41 : 19-21. Vernet R. 1993 · Prospection et valorisation du patrimoine naturel de la République de Djibouti. Rapport de mission. ONT/\ et SPSE de Djibouti. 46 p. Vernet R. & Grenot C. 1972 — Etude du milieu et structure trophirëue du pcuqplemcnt reptilicn dans le Grand Erg Occidental (Sahara algérien). C. R. Soc. iogéogr., 4, 3 : 97- 104. Mmmscrit accepté le 17 mars 2000 43
Bull. Soc. Hurp. H. (ZOUUJ 93 : 4547 IN MEMORIAM Albert Henri RAYNAUD (1914-1999) f¤‘*—’i|l ` I Le 22 novembre 1.999, ` T È disparaissait A.H. Raynaud, ui y ja herpétologiste passionne et l`un É., - des membres fondateurs de la ' '_ _, Il ` f`_ A"}? Société Herpétologique de France. _ Il menait depuis une vingtaine · _· .. ' d'annees une retraite active Qi •` ` i __ ~‘ q ; - ° Vabre, dans son Tarn natal. . l"",f`, A Ã, t Apres des études secondaires Qi ·' — QV . a · Albi et des etudes superieures ii I F ' ·i l_ 5 _ Toulouse, A.l·l. Ravnaud obtient ; fi · un Diplôme d`études supérieures Q t' Til de Zoologie, effectué sous la _ ' _ , .: N i ·_ direction de A. Vandel. ;: ' - " fl] , 'Y Il entre en l936 à l'Institut ` _ :" ;._` -l jÉ :1 " Pasteur de Paris dans le Service · J'2 ‘ af de A. Lacassagne. ll y effectue une /· ` thèse remarquée sur l'inter— J sexualité expérimentale chez les ;‘;*·._ il mammifères, qu'il soutient en *;.7 un 7 Q 1942, La même année, il est nommé t r à _’ Assistant a l'lnstitut Pasteur et, ft ` ‘* ·. l'année suivante, Maitre de " ' _, ·'î~` Recherches au C.N.R.S`., puis . A, · ·· _ .. ._ Directeur de Recherches a partir il D " I, M de l965. ll continue ses recherches `- sur la différenciation sexuelle . " (gonades, tractus uro-génital, .:1 -. ,,,,. . glande mammaire) de la souris r »— n—- jusquen lc)52. Mais, devenu allergique aux poils de mammifères, il doit changer de matériel detude, Cest alors qu’il crée à Sannois (Val d'©ise) le Service dlîmbryologie expérimentale de l`Institut Pasteur dans une maison ayant appartenu au Dr. E. Roux. Ayant constaté la présence cl`une abondante population d'orvets dans les collines boisées de Sannois et de Cormeilles-en- Parisis, il décide de travailler sur les reptiles. Pour créer de bonnes conditions delevage, il obtient de l'institut Pasteur que des bâtiments et des terrains entourant la propriété soient acquis. il y construit de vastes terrariums 45
adaptés à différentes especes: couleuvre tessellée, vipère aspic, orvet, lézard vert et lézard sicilien, tortue mauresque, tortue d`Hermann et cistude. Dans une ancienne salle de bal du Moulin de la Galette, ou il était "interdit aux hommes de danser entre eux ainsi qu`en casquette", il aménage plusieurs laboratoires, et des salles Spécialisées (photographie, histochimie, salles stériles, pieces dïncubation) créant ainsi un complexe expérimental proba- blement unique au monde pour l'étude du développement des reptiles. ll met au point des méthodes d'incubation pour les espèces ovipares et une technique de mise en culture des oeufs pour les especes vivipares. Aidé de Mme jeanne Raynaud, Chef de laboratoire à l'lnstitut Pasteur, de deux chercheurs CNRS et de techniciennes, il développe deux sujets de recherches principaux : le développement de l'appareil uro—génital des reptiles et le problème de la rudimentation des membres des squamates. La contribution du laboratoire de Sannois dans ces deux domaines est importante. En effet, c'est dans ce laboratoire que l'implication des hormones stéroïdes (A.l—l. Raynaud, ]. Raynaud et C. Pieau) et l'influence de la température sur la différenciation sexuelle (C. Pieau) ont été démontrées chez les reptiles. Ces résultats, repris par d'autres équipes et élargis à dautres espèces, ont eu un grand retentissement. En ce qui conceme la rudimentation des membres, A.H. Raynaud recherche la collaboration d'Anatomistes et fonde en 1972 une équipe de recherche du CNRS, associant deux chercheurs du laboratoire d'Anatomie Comparée du Muséum (].P. Gasc et S. Renous). L`objectif de cette équipe est de comparer la morphogénèse des membres et des ceintures chez les reptiles à membres bien développés et chez les reptiles à membres rudi~mentaires. Entre autres résultats, les différents états de réduction des membres, observés dans plusieurs espèces de squamates, peuvent être corrélés au nombre de somites participant à leur formation et sont expliqués par des arrêts du développement a différents stades. Parallèlement, A.H.Raynaud initie des recherches comparables dans dautres pays tels que l’lran et l’lnde dans lesquels il effectue plusieurs cycles de conférences. En 1976, il organise à Toulouse rn colloque international soutenu par le CNRS sur "Les mécanismes de la rudimentation des organes chez les embryons de vertébrés". A cette époque, la fermeture du laboratoire de Sannois est programmée par l`Institut Pasteur qui se restructure. AH. Raynaud envisage alors de créer à Montpellier un centre d`étude des reptiles regroupant des chercheurs de toutes disciplines. Ce projet difficile à réaliser n'aboutit pas. En l977, trop âgé pour créer une nouvelle unité et trop indépendant pour sintégrer à une unité existante, A.H. Raynaud décide de prendre sa retraite. En fait, il organise un laboratoire dans sa résidence de Vabre. Une à deux fois par semaine et jusquà la fin de sa vie, il se rend à l'Université Paul Sabatier de Toulouse dans deux laboratoires distincts pour y poursuivre ses recherches sur la rudimentation des membres. Celles-ci, effectuées en particulier avec Mme Clergue-Gazeau et avec le soutien de Mme Duprat, visent dune part, a arrêter le développement des membres chez le lézard vert et, d'autre part, à tenter de lever leur inhibition chez l'orvet. Pendant cette période, AH. Raynaud continue à publier régulièrement et participe à des congrès, 46
notamment celui organisé par ]. Chaline sur "Organogénèse et Evolution" (Dijon, 1985). Carl Gans, éditeur de "Biology of the Reptilia" le sollicite pour la rédaction d`un chapitre sur le développement de l'appareii uro-génital (en collaboration avec C.P.) et d`un autre sur le développement et la rudimcntation des membres, publiés en 1985. A cette importante activité de recherche, reconnue internationalement et récompensée en 1974 par un Grand Prix de l'Académie des Sciences (Prix Albert 1W de Monaco) s`ajoute une intense activité associative. En effet, en 1971, A.H. Raynaud participe à la fondation de la Société lierpétologique de France et entre dans le conseil l'année suivante, En 1973, il devient le Vice- Président et suscite la création de la Commission de Protection dont il est responsable pendant plusieurs années, jusquà son départ en retraite. En 1975, i l organise avec G. Naulleau et G. Matz le Congrès Européen d'Herpétologie de Toulouse. Etant également Président de la Société Zoologique de France, il obtient la publication de l'activité et des actes des colloques de la SHF dans le Bulletin de cette société. En 1976, il participe au projet d'élaboration du décret de protection des Reptiles et des Amphibiens ainsi qu`à l`examen du projet de création des réserves naturelles. Il est délégué par le Ministère de la Qualité de la Vie pour participer au groupe "Amphibiens et Reptiles" du Conseil de l'Hurope. Pendant sa retraite à Vabre, il fait preuve d'une grande activité locale et contribue en particulier a la diffusion de la connaissance herpétologique, ii travers la Société des Amis du Pays Vabrais, qu'il avait créée en 1973 et qu'il présidera jusqu'en 1982. ll sfengage avec énergie dans la défense de sites naturels à protéger, dans la création de crapauducs, et dans la lutte contre les préjugés concernant les serpents. A cet effet, il organise expositions, conférences, sorties sur le terrain et publie avec son fils ]ean-Luc un ouvrage sur "les Reptiles du département du Tarn" (lèm édition 1994, Zèmt? édition 1999). Tous ceux qui ont connu AH. Raynaud au sein dela SHF garderont de lui le souvenir d'un chercheur rigoureux et exigeant, qui défendait ses idées avec force et menait ses combatsjusquaux limites de ses possibilités. La SHF perd, outre un pionnier en embryologie reptilienne, rm ardent et efficace protecteur de l'herpétofaune. » Sabine Renous, ]ean-Pierre Gasc et Claude Pieau 47
Intemational Roundtable to Develop a Protocol on Chelonian Relocation and Heritage Collections Table ronde internationale pour réaliser un protocole adapté aux réintroductions et à l’élevage en captivité des Chéloniens 26-28 septembre 2000 Workshops spéciaux, 25 et 29 septembre 2000 à ORLANDO, Florida, USA Ce symposium regroupera les divers experts travaillant sur les tortues terrestres et d’eau douce : les biologistes, les vétérinaires, les gestionnaires, les éducateurs, les éleveurs, les étudiants, les représentants des agences de conservation et les passionnés du monde entier, Il aura pour but de créer pour l a première fois un protocole spécialement adapté à la réintroduction et l'élevage des tortues terrestres et d'eau douce. Sept domaines seront abordés : les considérations éthiques, pathologiques, génétiques et systématiques, environnementales, socio-économiques, les impacts inter et intra—spécifiques et l’élevage en captivité. Une présentation de communications et de posters sera possible afin d'aid er la table ronde dans sa réflexion sur le protocole. Envoyer un résumé de 100 mots au maximum si vous désirez présenter une communication, ou un poster à Patricia Ashton : PSASl·lT©N@aol.com. Cette table ronde est organisée sur l'initiative de Ray E. Ashton and du Dr Ghislaine Guyot pour créer un document pratique et utilisable par toutes les personnes impliquées dans la réintroduction et l’élevage des tortues. Le document sera basé sur les plus récentes données disponibles. Le format de la table ronde permettra une discussion avec l'assemblée. Les 7 domaines sont présidés par les spécialistes du monde entier. Parmi ceux—ci, le Dr Gerald Kuchling, de l’Université d’Australie de l'Ouest qui travaille sur la réintroduction de la tortue d’eau le plus rare au monde, le Dr Eliott jacobson dont l'équipe a découvert la bactérie responsable des rhinites chez les Gophems rzgassizii et G. polyphemus, le Dr Pritpal Singh Soorae du groupe [UCN/SSC Re—lntroduction Specialist Group (Kenya) et le Dr Peter Pritchard du Chelonian Research Institute qui apportera son expérience dans le domaine de la systématique. Les francophones seront particulièrement bien représentés puisque M. Antoine Cadi (Université Claude Bernard, Lyon l) et le Dr Ghislaine Guyot seront également dans le comité présidant les aspects inter et intra—spécifiques. Le protocole sera disponible en anglais et en français à la fin de l'an 2000. Pour les inscriptions, contacter : Ray Ashton or Ghislaine Guyot, the Ashton Biodiversity Research & Préservation lnstitute, 5745 SW 75*h Street #33l, Gainesville, FL 32608. E—l\/[ail - Tortfarm2@aol.com,/ Tel — (352) 495-7449 / Fax - (352) 495-7433 48